• Désir d’être, soudain, la bête hiératique,
    D’un éclat noir, sous le portique
    Escarbouclé d’un temple, à Benarès !

    Gueule tordue, avec de courbes dents livides.
    Masque divin et criminel,
    Avec de grands yeux vides,
    Avec, sous le front d’or, un œil d’or éternel.

    Sous un plafond de marbre noir, à Benarès.
    Ils arrivent les enfants clairs — et leurs...

  • De colline en colline
    La grande route s’incline
    Au crépuscule autour du mont.
    Nous qui sommes les hommes
    Qui descendons
    Vers les ombres de la vallée,
    Gardons
    Avec fierté sur notre front
    Le souvenir flottant des lueurs en...

  • Quand les fleurs de mon choix te décoraient la taille,
    T’en souviens-tu ? C’était dans les bois de Saint-Gloud.
    Un avion planait par le soir calme et doux
    Et blasonnait le ciel du côté de Versailles.
     
    Son bruit rude et guerrier nous donnait à songer :
    « Quand donc s’en ira-t-il vers les pays féroces,
    Par-dessus l’ennemi qui se terre en ses fosses,...

  •  

    Sur les fumiers, tassés par blocs,
    Au petit jour, chante le coq.

    Et tous les coqs du voisinage

    De cris touffus et angoissés
    Lui répondent, le cou dressé,
    Comme un bâton dans leur plumage.
    Morte de sommeil lourd,
    Une servante en jupons rouges,
    ...

  • À L’HOMME D’AUJOURD’HUI

    Songe au monde et sois fier, toi qui vis en ce temps.
    Il vibre, exulte et bat, selon ton cœur battant ;
    Il accepte ton rythme et jamais ta pensée
    Ne s’est aussi humainement divinisée.

    Les Dieux ne sont plus rien ou sont ce que tu es ;
    Leur infini s’ébranle au vent de tes projets ;...

  • Frère Jacques, frère Jacques,
    Réveille-toi de ton sommeil d’hiver....

  • Hélas ! en aucun lieu sous le soleil,
    Bannière au clair, ne s’exaltent les chevauchées
    Des escadrons bondissants et vermeils.
    Tout se passe là-bas, en des plaines transies,
    En France, en Allemagne,...

  • Un catafalque d’or surgit au fond des soirs,
    Quand les astres, comme des lampes,
    Brûlent, en étageant leurs rampes,
    Vers les lointains d’argent marbrant des parvis noirs.

    Quel mort en ce cercueil...

  • Plaines au Nord et mornes nues !…
    Les cavales des automnes chenues
    Que déchiraient des éperons d’éclair
    Tannaient le sol ou piétinaient la mer.

    Elles traînaient, à travers nuit,
    Leurs chariots de bruit,
    Si lourdement, leurs chariots de chocs,
    Qu’on aurait cru les cieux cassés, par blocs.

    Des mâts crucifiés, sur fond d’orage,...

  •  

    L’air est humide, épais et gras ;

    Taches de deuil, des oiseaux planent
    Auprès des sacs bondés qui s’alignent là-bas ;
    De terre en terre, ici, plus loin, par tas,
    À feux larges, brûlent les fanes.

    Mélancoliques et longues et lentes,
    Frôlant le sol, barrant les sentes,
    Tels des gestes qui s’en iraient
    ...