• Jeune ange aux doux regards, à la douce parole,
    Un instant près de vous je suis venu m'asseoir,
    Et, l'orage apaisé, comme l'oiseau s'envole,
    Mon bonheur s'en alla, n'ayant duré qu'un soir.

    Et puis, qui voulez-vous après qui me console ?
    L'éclair laisse, en fuyant, l'horizon triste et noir.
    Ne jugez pas ma vie insouciante et folle ;
    Car, si l'étais...

  • Dans Venise la rouge,
    Pas un bateau qui bouge,
    Pas un pêcheur dans l'eau,
    Pas un falot.

    Seul, assis à la grève,
    Le grand lion soulève,
    Sur l'horizon serein,
    Son pied d'airain.

    Autour de lui, par groupes,
    Navires et chaloupes,
    Pareils à des hérons
    Couchés en ronds,

    Dorment sur l'eau qui fume,
    Et croisent dans la...

  • Depuis qu'Adam, ce cruel homme,
    A perdu son fameux jardin,
    Où sa femme, autour d'une pomme,
    Gambadait sans vertugadin,
    Je ne crois pas que sur la terre
    Il soit un lieu d'arbres planté
    Plus célébré, plus visité,
    Mieux fait, plus joli, mieux hanté,
    Mieux exercé dans l'art de plaire,
    Plus examiné, plus vanté,
    Plus décrit, plus lu, plus...

  • Béatrix Donato fut le doux nom de celle
    Dont la forme terrestre eut ce divin contour.
    Dans sa blanche poitrine était un coeur fidèle,
    Et dans son corps sans tache un esprit sans détour.

    Le fils du Titien, pour la rendre immortelle,
    Fit ce portrait, témoin d'un mutuel amour ;
    Puis il cessa de peindre à compter de ce jour,
    Ne voulant de sa main illustrer...

  • O ciel ! je vous revois, madame,
    De tous les amours de mon âme
    Vous le plus tendre et le premier.
    Vous souvient-il de notre histoire ?
    Moi, j'en ai gardé la mémoire :
    C'était, je crois, l'été dernier.

    Ah ! marquise, quand on y pense,
    Ce temps qu'en folie on dépense,
    Comme il nous échappe et nous fuit !
    Sais-tu bien, ma vieille maîtresse,...

  • Il faudra bien t'y faire à cette solitude,
    Pauvre coeur insensé, tout prêt à se rouvrir,
    Qui sait si mal aimer et sait si bien souffrir.
    Il faudra bien t'y faire ; et sois sûr que l'étude,

    La veille et le travail ne pourront te guérir.
    Tu vas, pendant longtemps, faire un métier bien rude,
    Toi, pauvre enfant gâté, qui n'as pas l'habitude
    D'attendre...

  • Se voir le plus possible et s'aimer seulement,
    Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge,
    Sans qu'un désir nous trompe, ou qu'un remords nous ronge,
    Vivre à deux et donner son coeur à tout moment ;

    Respecter sa pensée aussi loin qu'on y plonge,
    Faire de son amour un jour au lieu d'un songe,
    Et dans cette clarté respirer librement -
    Ainsi...

  • LA MUSE

    Depuis que le soleil, dans l'horizon immense,
    A franchi le Cancer sur son axe enflammé,
    Le bonheur m'a quittée, et j'attends en silence
    L'heure où m'appellera mon ami bien-aimé.
    Hélas ! depuis longtemps sa demeure est déserte ;
    Des beaux jours d'autrefois rien n'y semble vivant.
    Seule, je viens encor, de mon voile couverte,
    Poser mon...

  • Tu te frappais le front en lisant Lamartine,
    Edouard, tu pâlissais comme un joueur maudit ;
    Le frisson te prenait, et la foudre divine,
    Tombant dans ta poitrine,
    T'épouvantait toi-même en traversant ta nuit.

    Ah ! frappe-toi le coeur, c'est là qu'est le génie.
    C'est là qu'est la pitié, la souffrance et l'amour ;
    C'est là qu'est le rocher du désert de la...

  • (extrait)

    ...Lorsque dans le désert la cavale sauvage,
    Après trois jours de marche, attend un jour d'orage
    Pour boire l'eau du ciel sur ses palmiers poudreux,
    Le soleil est de plomb, les palmiers en silence
    Sous leur ciel embrasé penchent leurs longs cheveux ;
    Elle cherche son puits dans le désert immense,
    Le soleil l'a séché ; sur le rocher...