• Palpitante encore du bal,
    Elle voulut, la blonde fille,
    M’accompagner jusqu’à la grille
    Où j’avais lié mon cheval.

    Malgré l’appel des ritournelles,
    Au jardin nous nous attardions,
    Et les choses que nous disions
    Étaient tristes et solennelles.

    Nous avions pris le long chemin,
    Nous avions pris le chemin sombre.
    Je ne la voyais pas...

  •  
    A la princesse D....

    C’est un parc Scandinave, aux sapins toujours verts,
    Où le vent automnal Courbe les fleurs d’hivers
    Dans les vases de marbre anciens sur la terrasse ;
    Et la vierge royale en qui revit la race
    Des brumeux Suénon dont son père descend,
    L’enfant blanche aux yeux clairs, la princesse du sang,
    Immobile...

  •  
    La pleine mer moutonne au loin sur les brisants.
    Dans les rocs qu’ont usés les flots et les jusants,
    La lame écume et bout au pied de la falaise ;
    Et, debout dans le vent, la jeune Granvillaise,
    Un bras devant les yeux, regarde à l’horizon,
    Car l’équinoxe approche et voici la saison
    Où la côte normande a le plus de naufrages ;
    Et les gens sont...

  • Du château de R

    Devant le pur, devant le vaste ciel du soir,
    Où scintillaient déjà quelques étoiles pâles,
    Sur la terrasse, avec des fichus et des châles,
    Toute la compagnie avait voulu s’asseoir.

    Devant nous l’étendue immense, froide et grise,
    D’une plaine, la nuit, à la fin de l’été.
    Puis un silence, un...

  •  

    J’AI visité la Tour énorme,
    Le mât de fer aux durs agrès.
    Inachevé, confus, difforme,
    Le monstre est hideux, vu de près.

    Géante, sans beauté ni style,
    C’est bien l’idole de métal,
    Symbole de force inutile
    Et triomphe du fait brutal.

    J’ai touché l’absurde prodige,
    Constaté le miracle vain.
    J’ai gravi, domptant...

  • Au village, en juillet. Un soleil accablant.
    Ses lunettes au nez, le vieux charron tout blanc
    Répare, près du seuil, un timon de charrue.
    Le curé tout à l’heure a traversé la rue,
    Nu-tête. Les trois quarts ont sonné, puis plus rien,
    Sauf monsieur le marquis, un gros richard terrien,
    Qui passe, en berlingot et la pipe à la bouche,
    Et qui, pour délivrer...

  •  

    Sur ta peau si tendre et si lisse,
    Dont ma bouche sait la douceur,
    Le soleil d’été, par malice,
    A mis des taches de rousseur.

    C’est tous les ans la même chose ;
    Et l’on dirait qu’il veut laisser
    Sur ton radieux teint de rose
    Une trace de son baiser.

    Mais j’aime tout de ce que j’aime ;
    Et ton front, si frais et si doux,
    M’...

  •  
    Le fils du grand Mourad, le sultan Mahomet,
    Quand il veillait le jour, la nuit quand il dormait,
    N’avait qu’une pensée et qu’un rêve : Byzance !
    Parfois, dans un léger caïque de plaisance
    Qu’emportaient sur la mer vingt robustes rameurs,
    Pensif, il écoutait les confuses rumeurs
    De la ville, et voyait, mais de trop loin encore,
    Ses dômes se...

  • Maître, l’envieux n’a pu satisfaire
    Sur toi son cruel et lâche désir.
    Ton nom restera pareil à la sphère,
    Qui n’a pas de point par où la saisir.

    Pourtant il fallait nier quelque chose
    A l’œuvre parfaite où tu mis ton sceau.
    Splendeur et parfum, c’est trop pour la rose ;
    Ailes et chansons, c’est trop pour l’oiseau.

    Ils ont dit : Ces vers sont...

  •  

    Mai, qu’avait jusqu’alors désolé le vent aigre,
    Mai, frileux sous les fleurs, en habit de vinaigre,
    S’était enfui, Joyeux, dans le ciel enchanté,
    Le chaud soleil de juin proclamait : « C’est l’été ! »
    Celle qui connaît bien mon sentiment pour elle
    Choisit sa robe claire et sa plus fraîche ombrelle ;
    Et pour le beau pays de forêts et d’étangs
    ...