• Mes yeux, ne lancez plus votre pointe éblouie
    Sur les brillants rayons de la flammeuse vie,
    Cillez-vous, couvrez-vous de ténèbres, mes yeux :
    Non pas pour étouffer vos vigueurs coutumières,
    Car je vous ferai voir de plus vives lumières,
    Mais sortant de la nuit vous n'en verrez que mieux.

    Je m'ennuie, de vivre, et mes tendres années,
    Gémissant sous...

  • Mon coeur ne te rends point à ces ennuis d'absence,
    Et quelque forts qu'ils soient sois encore plus fort,
    Quand même tu serais sur le point de la mort
    Mon coeur, ne te rends point, et reprends ta puissance.

    Que si tant de combats te donnent connaissance
    Que tu n'es pas toujours pour rompre leur effort,
    Garde-toi de tomber en un tel déconfort
    Que...

  • Quand le vaillant Hector, le grand rempart de Troie,
    Sortit tout enflammé, sur les nefs des Grégeois,
    Et qu'Achille charmait d'une plaintive voix
    Son oisive douleur, sa vengeance de joie.

    Comme quand le Soleil dedans l'onde flamboie
    L'onde des rais tremblants repousse dans les toits :
    La Grèce tout ainsi flottante cette fois
    Eut peur d'être à la...

  • Tel estoit ce bel Astre à son entrée au monde,
    Et deslors qu'il sortoit de son tendre berceau,
    Clair au poinct qu'on le veit autant que le flambeau
    Qui luît le jour dessus, et la nuict dessous l'onde.

    Ce feu sur le poignant de sa premiere Aurore
    Nous embasmoit les champs du nectar de ses pleurs,
    Et les champs repoussoyent un doux printemps de fleurs ;...

  • Qui serait dans les Cieux, et baisserait sa vue
    Sur le large pourpris de ce sec élément,
    Il ne croirait de tout rien qu'un point seulement,
    Un point encore caché du voile d'une nue.

    Mais s'il contemple après cette courtine bleue,
    Ce cercle de cristal, ce doré firmament,
    Il juge que son tour est grand infiniment,
    Et que cette grandeur nous est...

  • Si c'est dessus les eaux que la terre est pressée,
    Comment se soutient-elle encor si fermement,
    Et si c'est sur les vents qu'elle a son fondement,
    Qui la peut conserver sans être renversée ?

    Ces justes contrepoids qui nous l'ont balancée
    Ne penchent-ils jamais d'un divers branlement ?
    Et qui nous fait solide ainsi cet élément,
    Qui trouve autour de...

  • Tout s'enfle contre moy, tout m'assaut, tout me tente,
    Et le Monde et la Chair, et l'Ange revolté,
    Dont l'onde, dont l'effort, dont le charme inventé
    Et m'abisme, Seigneur, et m'esbranle, et m'enchante.

    Quelle nef, quel appuy, quelle oreille dormante,
    Sans peril, sans tomber, et sans estre enchanté,
    Me donras tu? Ton Temple où vit ta Sainteté,
    Ton...

  • Les vents grondaient en l'air, les plus sombres nuages
    Nous dérobaient le jour pêle-mêle entassés,
    Les abîmes d'enfer étaient au ciel poussés,
    La mer s'enflait des monts, et le monde d'orages ;

    Quand je vis qu'un oiseau délaissant nos rivages
    S'envole au beau milieu de ces flots courroucés,
    Y pose de son nid les fétus ramassés
    Et rapaise soudain...

  • Pour qui tant de travaux ? pour vous? de qui l'aleine
    Pantelle en la poictrine et traine sa langueur ?
    Vos desseins sont bien loin du bout de leur vigueur
    Et vous estes bien pres du bout de vostre peine.

    Je vous accorde encore une emprise certaine,
    Qui de soy court du Temps l'incertaine rigueur ;
    Si perdrez-vous enfin ce fruit et ce labeur :
    Le mont est...

  • Ne vous étonnez point si mon esprit qui passe
    De travail en travail par tant de mouvements,
    Depuis qu'il est banni dans ces éloignements,
    Tout agile qu'il est ne change point de place.

    Ce que vous en voyez, quelque chose qu'il fasse,
    Il s'est planté si bien sur si bons fondements,
    Qu'il ne voudrait jamais souffrir de changements
    Si ce n'est que le...