• - Et le mal nous a pris, séduisant, enjôleur,
    Comme un filet de soie en ses brillantes mailles.
    Eve a senti l'amour embraser ses entrailles ;
    Elle a, bénissant Dieu, fait l'homme de douleur.

    Dieu m'a dit, irrité : « Tu scelles ton malheur.
    Il faut que chaque jour tu souffres et travailles.
    Mon ciel vous est fermé comme par des murailles,
    Jusqu'au...

  • Aux vallons endormis la nuit glisse en silence.
    Mes vieux pins sont drapés dans leurs sombres manteaux.
    On n'entend plus monter le rythme des marteaux,
    On ne voit plus la nef que la vague balance.

    Une fauve lueur, comme un éclair de lance,
    Embrase un coin du ciel, au-dessus des coteaux.
    Les cimes ont de l'or dans leurs noirs chapiteaux.
    Vers ces...

  • Quand tu luis au-dessus de la forêt mouvante,
    On dirait que des feux s'allument tout au fond.
    Tu donnes un baiser à l'océan profond,
    Et l'océan frémit comme une âme vivante.

    Es-tu notre compagne ? Es-tu notre servante ?
    Ton éclat nous ravit, ton pouvoir nous confond.
    Sous ton voile brillant comme l'or qui se fond,
    N'es-tu qu'un astre mort où règne...

  • 19 juin 1837

    Accourez vite à nos splendides fêtes !
    Ici banquets, là concert, ailleurs bal.
    Les diamants rayonnent sur les têtes,
    Le vin rougit les coupes de cristal.
    Ce luxe altier qui partout se déroule,
    Le peuple va le payer en gros sous.
    Municipaux, au loin chassez la foule.
    Amusons-nous !

    Quel beau festin ! mets précieux et...

  • Si Cacus le rusé voleur
    Eût été plus méchant,
    Oluire, je te peindrais de sa couleur,
    Mais en tous points tu es bien pire ;
    Il ôta les biens sans occire,
    Ne fais tu pis à l'escient,
    Quand l'argent ne te peut suffire,
    Ains fais mourir le patient ?
    Tu dis le ciel auteur du fait.
    La terre couvre ton méfait.

  • Connais toi même, dit Phébus.
    Du ciel descendit ce précepte ;
    Pour guérir folie et abus,
    Lui, médecin, fit la recette ;
    Mais n'est pas seule ; j'en excepte,
    Et soutiens que d'avoir hanté
    Les gens, sondant leur volonté,
    Ne sert pas moins que se connaître.
    Veux tu bien vivre en sûreté ?
    Connais l'autrui, te voilà maître.

  • Un des savants le plus ignare,
    Des ignares le plus savant,
    En tes vers, ami, trouva tare,
    Peut être de nuit, en rêvant.
    Homère fut repris souvent
    De l'envieux et sot Zoïle,
    Et plusieurs ont pincé Virgile
    Sans peur toutefois de méprendre
    Car qui n'écrit en aucun style
    C'est le seul qu'on n'ose reprendre.

  • Le parler facile et commun
    Semble à Chéril des moins honnêtes.
    Un sot et lui c'est bien tout un ;
    L'obscur ne sied point aux poètes,
    Mais aux sibylles et prophètes ;
    Qui pourra lire sans moquer
    Les vers dans les nues secrètes,
    Qu'OEdipe ne peut expliquer ?

  • Vu que tu es en ce pays venu,
    Gentil esprit, grandement je m'étonne,
    Que l'olivier qui ces champs environne
    N'ait pas le son de tes vers retenu.
    Comme le luth en la Thrace connu,
    Tira les rocs : si ta muse résonne,
    Elle ravit la région qui tonne,
    Et le grand faix par Atlas soutenu.
    Je tenais hier ton livre entre mes mains,
    0ù sont les arts...

  • [...] Regardez cette mine orgueilleuse et sauvage
    Le feu de la Colere éclate en son visage.
    Son Esprit en desir détaché de son corps,
    Donne un second combat aux Esprits de ces morts
    Il sent avec plaisir leur meurtre et la victoire :
    Il les égorge avecque la memoire :
    Et cherche dans leur sang, qui commence à pourrir,
    S'il n'est rien demeuré qui puisse...