• C'est grand peine que de vivre,
    Et si ne veut-on mourir.

    Qui n'est de tous maux délivre,
    C'est grand peine que de vivre.

    Raison à la Mort nous livre,
    Rien ne nous peut secourir :
    C'est grand peine que de vivre,
    Et si ne veut-on mourir.

  • Lassé d'amours et des faits de Fortune,
    Tanné d'espoir et d'aimer trop fort une,
    Encloz d'ennui, maintenant je demeure,
    Car Desplaisir prend en moy sa demeure,
    De par Malheur qui tres fort me fortune.

    Dont je me treuve sans que joye nés une
    Soit en mon cueur secrete ne commune :
    Pour quoy je dis que je suis à ceste heure
    Lassé d'amours et des...

  • L'âme de moi, sous cette chair enclose,
    En nul vivant ores plus ne se fie :
    Car elle estime, honore et magnifie
    Le Seigneur Dieu par-dessus toute chose.

    Et mon esprit, pour la bonne assurance
    De voir la fin d'ennuyeuse tristesse,
    Se réjouit et fonde sa liesse
    En Dieu, mon bien et ma sûre espérance,

    Qui a daigné, par douceur amoureuse,...

  • A Hélias Boniface, d'Avignon.

    Voyant l'homme avaricieux,
    Tant misérable et soucieux,
    Veiller, courir et tracasser,
    Pour toujours du bien amasser
    Et jamais n'avoir le loisir
    De s'en donner à son plaisir,
    Sinon quand il n'a plus puissance
    D'en percevoir la jouissance,
    Il me souvient d'une alumelle,
    Laquelle, étant luisante et belle...

  • Loisir et liberté
    C'est bien son seul désir ;
    Ce serait un plaisir
    Pour traiter vérité.
    L'esprit inquiété
    Ne se fait que moisir ;
    Loisir et liberté,
    S'ils viennent cet été,
    Liberté et loisir,
    Ils la pourront saisir
    A perpétuité,
    Loisir et liberté.

  • Un jour de may, que l'aube retournee
    Rafraischissoit la claire matinee,
    Afin d'un peu recreer mes esprits,
    Au grand verger, tout le long du pourpris
    Me promenois par l'herbe fraische et drue,
    Là où je vis la rosee espandue.
    L'aube naissante avoit couleur vermeille
    Et vous estoit aux roses tant pareille
    Qu'eussiez douté si la belle prenoit
    ...

  • Les aveugles et violeurs
    Pour ôter aux gens leurs douleurs
    Chantent toujours belles chansons ;
    Et toutefois par chants et sons
    Ils ne peuvent chasser les leurs.

    Ce qu'ils chantent en leurs malheurs,
    Ils aiment mieux que les couleurs
    Ou moins qu'enfants longues leçons,
    Les aveugles.

    En chantant ils pensent ailleurs,
    Mêmement...

  • A Claude Bectone, Dauphinoise.

    Si Amour n'était tant volage
    Ou qu'on le pût voir en tel âge
    Qu'il sût les labeurs estimer,
    On pourrait bien sans mal aimer.

    Si Amour avait connaissance
    De son invincible puissance,
    Laquelle il oit tant réclamer,
    On pourrait bien sans mal aimer.

    Si Amour découvrait sa vue
    Aussi bien qu'il fait...

  • Au lecteur des 'Nouvelles récréations et joyeux devis'.

    Hommes pensifs, je ne vous donne à lire
    Ces miens devis, si vous ne contraignez
    Le front maintien de vos fronts rechignés ;
    Ici n'y a seulement que pour rire.

    Laissez à part votre chagrin, votre ire,
    Et vos discours de trop loin désignés.
    Une autre fois vous serez enseignés ;
    Je me...

  • Baigne mes pieds du cristal de tes ondes,
    O ma fontaine ! et sur ton frais miroir,
    Laisse tomber mes longues tresses blondes
    Flottant au gré de la brise du soir !

    Nymphe des bois, sur ton bassin penchée,
    J'aime à rêver à l'ombre des roseaux,
    Quand une feuille à sa tige arrachée,
    Ride en tombant la nappe de tes eaux.

    J'aime à plonger ma taille...