• Que le monde est constant en instabilité,
    Si l'on jouit d'une aise, au moins de l'apparence,
    Tantôt le sort muable en tranche l'espérance,
    Et tout est envieux de la félicité.

    Or' j'étais dédaigné de la feinte beauté
    Qui, par mille tourments, a prouvé ma constance,
    Ores, de mes douleurs, elle prend connaissance,
    Puis volage se rit de mon infirmité...

  • [...] Sus, sus, il faut partir, il faut trousser bagage,
    J'entends les grands hérauts de la divinité
    Qui me viennent sommer au céleste voyage,
    Seigneur, loge mon âme au sein de ta bonté.

    Adieu, soleil, qui sors de l'onde marinière
    Pour faire voir à tous ce petit monde, adieu,
    Je vais voir un soleil, dont la pure lumière
    Ravit les habitants de la...

  • Ceux qui nagent à gré, au courant des délices
    De ce monde orageux, inconstant et mouvant,
    Se gavent de ceux-ci, qu'un impétueux vent
    Pousse au seuil des rochers, voisins des précipices,

    Ceux-là, bous d'orgueil, font gloire de leurs vices,
    Servent à leurs désirs, vont les bons poursuivant
    Pour les rendre confus, malins les décevant
    Par leur fausse...

  • Cache-toi, beau Soleil, je ne mérite pas
    Entrevoir la lueur de ta face suprême,
    Mais las ! sans tes rayons tout périrait çà-bas,
    Il faut donc que chétif je me cache moi-même.

    Le lieu le plus secret d'un désert écarté,
    L'ombrage plus obscur d'un antre plus sauvage,
    Rien ne peut déceler ma pâle iniquité,
    Au vice ayant donné mon âme pour otage....

  • ... Sur les flancs du Moléson,
    Ah ! voyez ce frais gazon !
    Entendez les chansonnettes
    Du pinson, des alouettes ;
    Chantons, que l'on soit prêt !
    Partons pour le chalet. [...]

  • La lune est d'argent sous les arbres roses,
    Des fruits fabuleux font plier les branches
    Et voici neiger des floraisons blanches. -
    Un follet s'enfuit par l'ombre morose.

    Tes yeux fous, ce sont des enfants perdus
    Que séduit l'ardeur des fruits défendus ;
    Tes yeux d'or ce sont des enfants pervers
    Curieux d'amour et de pommes vertes ;
    Je vois,...

  • Quand on rentre chez soi, délivré de la rue,
    Aux fins d'automne où, gris cendré, le soir descend
    Avec une langueur qu'il n'a pas encore eue,
    La chambre vous accueille alors tel qu'un absent...

    Un absent cher, depuis longtemps séparé d'elle,
    Dont le visage aimé dormait dans le miroir ;
    Ô chambre délaissée, ô chambre maternelle
    Qui, toute seule, eût des...

  • Les miroirs, par les jours abrégés des décembres,
    Songent-telles des eaux captives-dans les chambres,
    Et leur mélancolie a pour causes lointaines
    Tant de visages doux fanés dans ces fontaines
    Qui s'y voyaient naguère, embellis du sourire !

    Et voilà maintenant, quand soi-même on s'y mire,
    Qu'on croit y retrouver l'une après l'autre et seules
    Ces figures...

  • L'aquarium, toujours frissonnant, est étrange
    Avec son eau qu'on ne sait quoi ride et dérange
    Et qui se crispe moins d'un éveil de poissons
    Que des yeux qu'en passant nous posâmes sur elle,
    Et de savoir un peu de ce que nous pensons.
    On dirait que toujours quelque chose chancelle
    Dans cette eau sensitive au silence ambigu.
    Eau de l'aquarium qui,...

  • Si tristes les vieux quais bordés d'acacias !
    Pourtant, toi qui passais, tu les apprécias
    Ces vieux quais où tel beau cygne de l'eau changeante
    Entre parfois dans une âme qui s'en argente.
    Si tristes les vieux quais, les eaux pleines d'adieux,
    Inertes comme les bandeaux silencieux
    D'une morte ! les eaux sur qui pleure une cloche,
    Les immobiles eaux sur...