• Fronton vertigineux dont un monde est le temple,
    C’est à l’éternité que ce cap fait songer :
    Laisse en face de lui l’heure se prolonger
    Silencieusement, ô mon âme, et contemple !

    Défiant le calcul, au sein du fleuve obscur
    Il plonge ; le miroir est digne de l’image.
    Et quand le vent s’endort au large, le nuage
    Couronne son front libre au pays de l’...

  • Quand au zénith trôna la pâle nébuleuse ;
    Quand tout devint muet sous le ciel étoilé ;
    Dans le passé fatal que le noir chagrin creuse,
    À l’œil de mon esprit quand tout se fut voilé ;
    Entre les bords abrupts du sombre défilé
    Où passaient les frissons de la brise berceuse,
    Quand tout fut recueilli, la Nuit mystérieuse,
    La Nuit, la grande Nuit sereine m’a...

  • De nouveau, la douleur envahissait mon être.
    Dès que la nuit trop brève au Levant eût pâli,
    Quand furent disparus le Silence et l’Oubli,
    J’ai senti le remords de mon passé paraître.

    De nouveau la douleur envahissait mon être.

    Sur le premier degré du grand cap Trinité,
    La mère de Jésus se dressait dans l’aurore...
    Cependant que ma voix troublait l’...

  • Ce rocher qui de Dieu montre la majesté,
    Qui dresse sur le ciel ses trois gradins énormes,
    Et verticalement divise en trois ses formes,
    Il mérite trois fois son nom de Trinité.

    Son flanc vertigineux, creusé de cicatrices
    Et plein d’âpres reliefs qu’effleure le soleil,
    Aux grimoires sacrés de l’Égypte est pareil,
    Quand l’ombre et la lumière y mêlent...

  • Les deux Caps éternels, par différentes voies,
    Vers les secrets divins élèvent la pensée.

    L’un, comme un escalier somptueux et royal,
    Offre ses trois degrés qu’une forêt touffue
    Recouvre d’un tapis velouté de sinople.

    Aussi la Trinité, par les degrés du rêve,
    Facilite au croyant l’ascension du ciel,
    Convie à la splendeur des extases divines
    L’...

  • Combien d’heures, hélas ! trop brèves, sont passées,
    Pendant que jusqu’à Dieu s’élevaient nos pensées,
    Et que, dans le repos du jour silencieux,
    J’enivrais de grandeur mon esprit et mes yeux !
    Le soleil au zénith couronnait sa carrière.
    Mon rapide aviron troubla la pureté
    De l’onde chatoyante où jouait la lumière,
    Et j’atteignis bientôt le Cap Éternité...

  • Quand je me relevai sur le Cap légendaire,
    Il projetait une ombre immense au roc voisin ;
    Plus le disque écroulé penchait vers son déclin,
    Plus l’ombre s’allongeait tout au loin sur la terre.
    Couvrant gorges et monts, ce voile violet
    En deux plans bien tranchés partageait l’étendue :
    Déjà l’aile du Soir à droite frissonnait ;
    Jusqu’aux derniers confins...

  • J’attendais le vent d’ouest, car à l’Anse Saint-Jean
    Je devais m’embarquer pour relever le plan
    D’un dangereux récif au large des Sept-Îles.

    J’avais d’abord goûté l’éloignement des villes
    Dans cette solitude, au pied des hauts glacis,
    Chez les bons paysans rompant le bon pain bis,
    Pendant que l’on gréait la svelte goélette
    Qui, dans l’épais brouillard...

  •  
    Agite, bon cheval, ta crinière fuyante ;
    Que l’air autour de nous se remplisse de voix !
    Que j’entende craquer sous ta corne bruyante
    Le gravier des ruisseaux et les débris des bois ’.

    Aux vapeurs de tes flancs mêle ta chaude haleine,
    Aux éclairs de tes pieds ton écume et ton sang !
    Cours, comme on voit un aigle en effleurant la plaine
    ...

  •  
    Ils tombent épuisés ; la bataille était rude.
    Près d’un fleuve, au hasard, sur le dos, sur le flanc,
    Ils gisent, engourdis par tant de lassitude
    Qu’ils sont bien, dans la boue et dans leur propre sang

    Leurs grandes faux sont là, luisantes d’un feu rouge,
    En plein midi. Le chef est un vieux paysan :
    Il veille. Or il croit voir un pli du sol qui bouge...