• J’avais peiné comme Sisyphe
    Et comme Hercule travaillé
    Contre la chair qui se rebiffe.

    J’avais lutté, j’avais baillé
    Des coups à trancher des montagnes,
    Et comme Achille ferraillé.

    Farouche ami qui m’accompagnes,
    Tu le sais, courage païen,
    Si nous en fîmes des campagnes,

    Si nous avons négligé rien
    Dans cette guerre exténuante,...

  • I’ay esté par vn long temps
    Deceue de l’esperance :
    Et si encor point n’attens
    D’elle plus grand’asseurance,
    Que celle là, que ma foy
    Me peult promettre de soy.

    Ie voy les vns fort contents,
    Les autres pleins de souffrance :
    De ceulx là les rys i’entens,
    De ceulx cy la douleance :
    Ces passions i’apperçoy
    Regner toutes deux en...

  •  
    … il est, au cœur de la vallée, un étang que
    l’on nomme l’Etang mystérieux.

    Je connais un étang qui somnole, blêmi
    Par l’aube blême et par le clair de lune ami.

    Un iris y fleurit, hardi comme une lance,
    Et le songe de l’eau s’y marie au silence.

    Aucun souffle ne fait balancer les roseaux.
    Le ciel qui s’y reflète a la couleur des eaux.

    ...
  • Je crève de pitié, d’aimer et de sourire :
    mais, sourire, ne m’est pas toujours possible,

    et ce petit chat m’a rempli d’une tristesse grise.
    Il miaulait sous la grande porte de la mairie,

    par ce soir pluvieux, boueux, et j’ai senti
    toute l’infinité résignée et muette

    de la douleur des bêtes, de la douleur des bêtes.
    Mon Dieu : qu’allait-il faire ?...

  • Je faisois ces Sonets en l'antre Pieride,
    Quand on vit les François sous les armes suer,
    Quand on vit tout le peuple en fureur se ruer,
    Quand Belonne sanglante alloit devant pour guide:

    Quand en lieu de la Loy le vice, l'homicide,
    L'impudence, le meurtre, et se sçavoir muer
    En Glauque et en Prothée, et l'Estat remuer,
    Estoient tiltres d'honneur,...

  •  
    C’est l’heure où le désir implore et persuade…
    Le monde est amoureux comme une sérénade,
    Et l’air nocturne a des langueurs de sérénade.

    Les ouvriers du soir, tes magiques amis,
    Ont tissé d’or léger ta robe de samis
    Et semé d’iris bleus la trame du samis.

    Il me semble que nous venons l’une vers l’autre
    Du fond d’un autrefois inconnu qui fut...

  • Je garde une médaille d’elle où sont gravés
    une date et les mots : prier, croire, espérer.
    Mais moi, je vois surtout que la médaille est sombre :

    son argent a noirci sur son col de colombe.

  •  
    Je la désire dans cette ombreuse lumière
    qui tombe avec midi sur la dormante treille,
    quand la poule a pondu son œuf dans la poussière.
    Par-dessus les liens où la lessive sèche,
    je la verrai surgir, et sa figure claire.
    Elle dira : je sens des pavots dans mes yeux.
    Et sa chambre sera prête pour son sommeil,
    et elle y entrera comme fait une...

  •  
    « Je la verrai : l’air est serein,
    « Le ciel est pur et sans nuage ;
    « Sous les tilleuls de ce jardin
    « Elle viendra chercher l’ombrage.
    « De loin mes regards la suivront
    « Parmi la foule murmurante ;
    « Nos yeux muets se parleront,
    « Et j’oublierai ma longue attente.

    « Je ne la verrai pas ! non, non !
    « Le lilas tremble sur sa tige...