• Arrête, compagnon, car les ombres allongent.
    Sur ces gradins étroits du temple abandonné,
    drapés dans nos manteaux de laine et dans nos songes
    nous attendrons en paix qu’un jour nouveau soit né.
    Les pêcheurs sont rentrés au port ; j’entends les cimes
    bruire faiblement des grands pins maritimes,
    et le chant alterné des vagues dans la nuit.
    Mais les...

  • Au fond du ciel, non de la mer,
    Prise aux filets que tu tendis,
    Si, pour des raisons qui m’échappent,
    Tu m’en veux, ondine de l’air.
    De t’offrir nue au paradis,
    Ne vas emprunter une écharpe
    A cet azur d’avril en herbe.

    Poissons ! du printemps messagers
    Comme jadis les hirondelles...

  • Qu’elle était large et belle, assise au bord des mers,
    La grand’ville levant cent tours sur ses épaules,
    Où les hommes de l’équateur et des deux pôles
    Se rassemblaient et trafiquaient de l’univers.

    Un maître sombre et fort [1] y dressait sa statue ;
    Sur une épée énorme il maintenait ses...

  • Dans ces bois, où souvent une muse chérie
    S’est révélée à moi comme une autre Égérie,
    Hier, épouvanté, je vis à l’horizon,
    Où riait un hameau, fumer un noir tison,
    Et j’osai blasphémer : Oh ! si j’étais l’Archange
    Que Dieu fait voyager dans nos chemins de fange,
    Le visiteur sanglant que, pour sauver les siens,
    Il envoya heurter aux seuils égyptiens,...

  • I

    Hannetons,
    Faibles avortons,
    Vous êtes de singuliers êtres.
    D'être grands quand nous nous vantons,
    Nous mentons ;
    Car vous serez toujours nos maîtres.
    Nous vous garrottons,
    Nous vous maltraitons...
    Nous vous regrettons !

    Refrain

    Hannetons,
    Faibles avortons,
    Nous vous regrettons,
    Hannetons !

    II...

  •  
    I

    Je me rappelle avoir autrefois en Bavière,
    A la porte d’un bourg que baigne une rivière,
    Rencontré sur ma route un chanteur ambulant
    Qui suivait l’eau d’un pas mélancolique et lent ;
    Il portait sur l’épaule une harpe ternie,
    Dont chacun de ses pas tirait une harmonie.
    Il était maigre et pâle ; il avait de grands yeux ;
    Ses cheveux sur...

  •  
    Le travail est divin.

    Gloire à la puissante Industrie,
    Reine de la terre et des eaux !
    L’homme enfin comprend son génie,
    Il ose admirer ses travaux ;
    Le cri du sol sous la charrue,
    Du marbre enlevé par la grue,
    Du bronze frappé du marteau,
    Pour son oreille a plus de charmes
    Que le canon d’un peuple en armes,
    ...

  •  
    Il est, n’en doutons pas, il est une Harmonie,
    Qui naît du choix des mots qu’enchaîne le Génie,
    Et, dans tous les sujets, par des accords divers,
    On peut à la musique égaler l’art des vers.
    On la peut surpasser, j’ose le dire encore ;
    Volez, Alexandrins, qu’une image décore,
    En calculant vos sons, tristes ou gracieux,
    Vous peindrez à l’oreille...

  •  
    Chaque lettre en passant, ou plus lente ou plus vive,
    Vous a-t-elle saisi par sa voix distinctive ?
    Il vous faut, dans les mots, fidèle à mes leçons,
    Augmenter son effet en répétant ses sons,
    N’allez pas toutefois, Poëte géomètre,
    Outrer un tel sistème, ou le prendre à la lettre,
    Et tourmenter la langue, au point de calculer
    Des vers, que le...

  •  
    À plus d’un examen ces vers furent soumis.
    Mais, si j’en crois enfin mes sévères amis
    J’ai prouvé que ma langue avec art combinée,
    Tantôt impérieuse et tantôt dominée,
    Par des sons inégaux pouvait également
    Rendre l’horreur sensible et peindre l’agrément ;
    Mais refusant de moi l’exemple et les préceptes,
    Sans doute ils soutiendront, ces...