• Rondeau

    Quand il lui plaît, Fortune fait avoir
    Gloire et honneur, richesses et avoir,
    Et quelques-uns met au haut de sa roue,
    Lesquels soudain fait descendre en la boue,
    Tant qu'ils en sont pitoyables à voir.

    De patience il se convient pourvoir,
    Quand résister on veut à son pouvoir ;
    Car elle rit, puis soudain fait la mine,
    Quand...

  • La fortune envieuse,
    Voyant mon jour passer,
    De la nuit est joyeuse
    Pour me faire penser
    Vrai ce que le Ciel dit
    Pour se mettre en crédit.

    Mais savoir n'ai envie
    Des Planètes le cours
    Pour connaître ma vie,
    Ayant autre discours :
    Car tant que je verrai
    Mon jour, je ne mourrai.

    Ne trouve point étrange,
    Si,...

  • J'ai longtemps voyagé, courant toujours fortune
    Sur une mer de pleurs, à l'abandon des flots
    De mille ardents soupirs et de mille sanglots,
    Demeurant quinze mois sans voir soleil ni lune.

    Je réclamais en vain la faveur de Neptune
    Et des astres jumeaux, sourds à tous mes propos,
    Car les vents dépités, combattant sans repos,
    Avaient juré ma mort...

  • Bien que Fortune en haut degré te range
    Dessus sa roue, et combien que Nature
    Pour t'embellir sur toute créature,
    Te fasse luire en cette beauté d'Ange,

    Si ne dois-tu dépriser la louange
    Que tu reçois de moi, car l'écriture,
    Plus que beauté mortelle, beaucoup dure :
    L'écrit demeure, et fortune se change.

    Crois que vieillesse enfin arrivera...

  • Fortune enfin piteuse à mon tourment,
    Me fit revoir le soleil de mes yeux,
    Alors qu'Amour me traitant encor mieux,
    Me fit jouir de mon contentement.

    Ô jour heureux, éclairci clairement,
    De mon soleil ! ô soleil gracieux,
    Saint, et luisant plus que celui des cieux !
    Digne de lui en tout le firmament !

    Le grand plaisir, que j'eus de toi...

  • Las où est maintenant ce mespris de Fortune
    Où est ce coeur vainqueur de toute adversité,
    Cest honneste desir de l'immortalité,
    Et ceste honneste flamme au peuple non commune ?

    Où sont ces doulx plaisir, qu'au soir soubs la nuict brun
    Les Muses me donnoient, alors qu'en liberté
    Dessus le verd tapy d'un rivage esquarté
    Je les menois danser aux rayons de...

  • N'étant de mes ennuis la fortune assouvie,
    Afin que je devinsse à moi-même odieux,
    M'ôta de mes amis celui que j'aimais mieux,
    Et sans qui je n'avais de vivre nulle envie.

    Donc l'éternelle nuit a ta clarté ravie,
    Et je ne t'ai suivi parmi ces obscurs lieux !
    Toi, qui m'as plus aimé que ta vie et tes yeux,
    Toi, que j'ai plus aimé que mes yeux et ma vie....