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    Voyez-vous ce blessé qui se tord sur la terre?
    Il va mourir ici, pres du bois solitaire,
    Sans que de sa souffrance un seul cœur ait pitié;
    Mais ce qui doublement fait saigner sa blessure,
    Ce qui lui fait au cœur la plus âpre morsure,
    C’est qu’en se souvenant, il se sent oublié.

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    Le cri qu’il nous arrache est un hennissement.
    J. M. DE HEREDIA.

    Je t’ai vu devant moi surgir. Tu étais beau.
    Le soleil au déclin, de la croupe aux sabots,
    T’empourprait tout entier de sa splendeur farouche.
    Ardent de ta vitesse et cabré de ta course,
    Tu dressais, sur le ciel derrière toi sanglant,
    Homme et cheval, le double...

  • D'Amour d'Amour je fu je fu blessé,
    Et de mon sang la liqueur goute a goute
    En chaudes pleurs hors ma playe degoute,
    Qui de couler puis le temps n'a cessé.

    Je suis d'Amour si bien interessé.
    Que peu a peu s'enfuit ma force toute,
    Et quelque onguent qu'a ma playe je boute
    Sans l'etancher, mon mal ne m'a laissé.

    En tel estat ma blessure...

  • Ô mon Dieu, vous m'avez blessé d'amour
    Et la blessure est encore vibrante,
    Ô mon Dieu, vous m'avez blessé d'amour.

    Ô mon Dieu, votre crainte m'a frappé
    Et la brûlure est encor là qui tonne,
    Ô mon Dieu, votre crainte m'a frappé.

    Ô mon Dieu, j'ai connu que tout est vil
    Et votre gloire en moi s'est installée,
    Ô mon Dieu, j'ai connu que...

  • Blessé d'une plaie inhumaine,
    Loin de tout espoir de secours,
    Je m'avance à ma mort prochaine,
    Plus chargé d'ennuis que de jours.

    Celle qui me brûle en sa glace,
    Mon doux fiel, mon mal et mon bien,
    Voyant ma mort peinte en ma face,
    Feint hélas ! n'y connaître rien.

    Comme un roc à l'onde marine
    Elle est dure aux flots de mes pleurs...

  • Mortellement atteint d'une flèche empennée,
    Un Oiseau déplorait sa triste destinée,
    Et disait, en souffrant un surcroît de douleur :
    "Faut-il contribuer à son propre malheur !
    Cruels humains ! vous tirez de nos ailes
    De quoi faire voler ces machines mortelles.
    Mais ne vous moquez point, engeance sans pitié :
    Souvent il vous arrive un sort comme le nôtre....

  • Puisque le cors blessé, mollement estendu
    Sur un lit qui se courbe aux malheurs qu'il suporte
    Me faict venir au ronge et gouster mes douleurs,
    Mes membres, jouissez du repos pretendu,
    Tandis l'esprit lassé d'une douleur plus forte
    Esgalle au corps bruslant ses ardentes chaleurs.

    Le corps vaincu se rend, et lassé de souffrir
    Ouvre au dard de la mort sa...