•  
            Dalila, courtisane au front mystérieux,
            Aux mains de sortilège et de ruse, aux longs yeux
            Où luttaient le soleil, l’orage et la nuée,
            Rêvait :
                                « Je suis l’esclave et la prostituée,
            La fleur que l’on effeuille au festin du désir,
            La musique d’une heure et le chant d’un loisir...

  •  
            L’ombre jetait vers toi des effluves d’angoisse :
            Le silence devint amoureux et troublant.
            J’entendis un soupir de pétales qu’on froisse,
            Puis, lys entre les lys, m’apparut ton corps blanc.

            J’eus soudain le mépris de ma lèvre grossière…
            Mon âme fit ce rêve attendri de poser
            Sur ta grâce où...

  •  
            Ton rire est clair, ta caresse est profonde,
            Tes froids baisers aiment le mal qu’ils font ;
            Tes yeux sont bleus comme un lotus sur l’onde,
            Et les lys d’eau sont moins purs que ton front.

            Ta forme fuit, ta démarche est fluide,
            Et tes cheveux sont de légers réseaux ;
            Ta voix ruisselle ainsi qu’un...

  •  
            Donne-moi tes baisers amers comme des larmes,
            Le soir, quand les oiseaux s’attardent dans leurs vols.
            Nos longs accouplements sans amour ont les charmes
            Des rapines, l’attrait farouche des viols.

            Tes yeux ont reflété la splendeur de l’orage…
            Exhale ton mépris jusqu’en ta pâmoison,
            O très chère...

  • La nuit, pour rafraîchir la nature embrasée,
    De ses cheveux d’ébène exprimant la rosée,
    Pose au sommet des monts ses pieds silencieux,
    Et l’ombre et le sommeil descendent sur mes yeux
    C’était l’heure où jadis !... Mais aujourd’hui mon âme,
    Comme un feu dont le vent n’excite plus la flamme,
    Fait pour se ranimer un inutile effort,
    Retombe sur soi-même,...

  •  
    J’aimerais vous chanter l’eau blanche du torrent,
    Qui dans la nuit des pins circule en murmurant,
    Car j’entends de ses flots les bruyantes batailles,
    Autour des rocs moussus, sous les grandes broussailles.
    Je pourrais du taureau dire le grondement,
    Lorsqu’aux pentes des monts, se levant lourdement,
    Il promène le soir son regard fier et louche
    ...

  • En voulant mettre un peu d’ordre dans ce tiroir,
    Je me suis perdu par mes grands vingt ans,
    Ce soir de noël gras.
    Ah ! Dérisoire créature !
    Fleuve à reflets, où les deuils d’unique ne durent
    Pas plus que d’autres ! L’ai-je...

  •  
            Sous un ciel ambigu, l’olivier et l’acanthe
            Mêlent subtilement leurs frissons bleus et verts,
            Et dans l’ombre fleurit, comme un songe pervers,
            L’harmonieux baiser de l’amante à l’amante.

            Les cheveux aux bruns roux d’automne et d’amarante
            Et les pâles cheveux plus blonds que les hivers
            ...

  • (I)

    La nuit s'est refermée
    Comme un calice obscur
    Sur la pulpe dorée
    Et tiède de la chambre.

    La lampe se consume
    Sous un arc de silence
    Et je ne sais plus rien
    Sinon que je suis seul,

    Mordu par un désir
    Qui se mêle aux rumeurs
    Du jardin frissonnant
    Sous l'averse nocturne.

    Un nom - hier ignoré...

  • [...]
    L'onde qui baise ce rivage,
    De quoi se plaint-elle à ses bords ?
    Pourquoi le roseau sur la plage,
    Pourquoi le ruisseau sous l'ombrage
    Rendent-ils de tristes accords ?

    De quoi gémit la tourterelle
    Quand, dans le silence des bois,
    Seule auprès du ramier fidèle,
    L'Amour fait palpiter son aile,
    Les baisers étouffent sa voix ?...