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    J’ai, de façon presque incongrue,
    Bâillé dans le monde, hier soir...
    Ma petite amie, allons voir
    Les humbles passants dans la rue.

    Le musc est un affreux parfum ;
    On m’a dit trop de platitudes...
    Dans le faubourg aux odeurs rudes,
    Écoutons les gens du commun.

    J’ai vu des messieurs pleins de morgue
    Et des dames raides d’empois......

  • Puisqu’à peine désenlacée
    De l’étreinte de mes deux bras,
    Tu demandes à ma pensée
    Ces vers qu’un jour tu brilleras,

    Il faut, ce soir, que je surmonte
    L’état d’adorable langueur
    Où je rougis un peu de honte,
    Tout en souriant de bonheur.

    Pourtant je l’aime, ma fatigue.
    C’est ton œuvre, et le long baiser
    De ta bouche ardente et...

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    À Henri Mercier.

    Avec les fleurs, avec les femmes,
    Avec l’absinthe, avec le feu,
    On peut se divertir un peu,
    Jouer son rôle en quelque drame.

    L’absinthe bue un soir d’hiver
    Éclaire en vert l’âme enfumée,
    Et les fleurs, sur la bien-aimée
    Embaument devant le feu clair.

    Puis les baisers perdent leurs charmes,
    ...

  • Hé bien ! j’ai triomphé, l’on m’a fort applaudie,
    J’ai su rire, chanter, jouer la comédie,
    Être jeune une fois & répondre à chacun,
    Sur son salut banal, un autre lieu commun.
    L’éclair à la prunelle & le rose à la joue,
    Hé bien ! c’est vrai, j’ai fait tout cela, je l’avoue.
    Et cependant, malgré tant de sérénité,
    De mouvement, de bruit, de...

  • Le lendemain du premier jour de may,
    Dedens mon lit ainsi que je dormoye,
    Au point du jour m'avint que je songay
    Que devant moy une fleur je veoye,
    Qui me disoit : " Amy, je me souloye*
    En toy fier, car pieça mon party
    Tu tenoies ; mais mis l'as en oubly
    En soustenant la fueille contre moy.
    J'ay merveille que tu veulx faire ainsi :
    Riens n'ay...

  • À Éléonore.

    Enfin, ma chère Éléonore,
    Tu l'as connu ce péché si charmant,
    Que tu craignais, même en le désirant ;
    En le goûtant, tu le craignais encore.
    Eh bien ! dis-moi : qu'a-t-il donc d'effrayant ?
    Que laisse-t-il après lui dans ton âme ?
    Un léger trouble, un tendre souvenir,
    L'étonnement de sa nouvelle flamme,
    Un doux regret, et surtout...

  • D'un air languissant et rêveur
    Justine a repris son ouvrage ;
    Elle brode ; mais le bonheur
    Laissa sur son joli visage
    L'étonnement et la pâleur.
    Ses yeux qui se couvrent d'un voile
    Au sommeil résistent en vain ;
    Sa main s'arrête sur la toile,
    Et son front tombe sur sa main.
    Dors et fuis un monde malin :
    Ta voix plus douce et moins...