• La pierre était triste, en songeant au chêne
    Qui libre et puissant croît au grand soleil,
    Du haut des rochers regarde la plaine,
    Et frissonne et rit quand l’air est vermeil.

    Le chêne était triste, en songeant aux bêtes
    Qu’il voyait courir sous l’ombre des bois,
    Aux cerfs bondissants et dressant leurs têtes,
    Et jetant au ciel des éclats de voix.

    ...
  • Pareille en ton caprice aux reines d’Orient,
    Bizarre déité, qui fais en souriant
    Mourir ceux qui venaient de s’enivrer la tête
    Aux parfums de ton corps, à la brûlante fête
    Que leur donnaient tes seins d’où ruisselait l’amour :
    — Reine, malgré la mort, quand apparaît le jour,
    Malgré ta cruauté tranquille, et les mensonges
    De tes bras repliés pour...

  • Oh ! si tu pouvais, comme la sirène,
    Emporter mon cœur dans le fond des eaux,
    Dans un clair palais, où tu serais reine,
    Dans un palais clair tout rempli d’oiseaux,

    Où près des bassins faits de porcelaine,
    Pleins de nénuphars et de longs roseaux,
    Je m’endormirais en ta chère haleine,
    Sentant sur mon cœur la fraîcheur des eaux.

    Oh ! si tu pouvais...

  • Au visage de mon squelette
    Voici le loup de velours noir,
    Le loup où votre lèvre, un soir.
    Mit des parfums de violette.

    Par cette antithèse toujours
    Je veux me rappeler, madame,
    Le vide aimable de votre âme
    Et la vanité des amours.

    Oh ! je ne me plains pas : la chose
    Est trop connue en vérité ;
    Mais j’ai quelque peu regretté
    ...

  • L’Océan de l’Immensité
    Agite & soulève ses vagues.
    Le Soleil brille, & sa clarté
    Y fait luire des formes vagues.

    Et sans cesse, à l’appel du vent,
    Des flots montent à la surface ;
    Puis soudain ce qui fut vivant
    S’éteint, s’évanouit, s’efface.

  • Un Christ en croix, saignant, maigre, pâle, livide.
    Il est seul, déserté de tous ; le ciel est vide :
    Ce ciel qu’il évoquait d’un regard éperdu :
    Ne s’est pas entr’ouvert et n’a rien répondu :
    Et ce Christ est-il mort dans l’angoisse suprême,
    Ayant douté de nous, de douter de Dieu même ?

  • Allah lui parle :

    La terre, l’Océan et le ciel sont mon corps ;
    Je suis tous les vivants et je suis tous les morts ;
    Le soleil, ce grand cœur brûlant, est mon cœur même ;
    Je meurs et je renais sans fin, je souffre et j’aime.
    Chacun de vous peut dire, ô rayons...

  • J’ai mon sein, j’ai dans mon âme
    Un désir d’amour étouffant :
    Que veut mon rêve ? est-ce une femme,
    Blonde et pure comme une enfant ?

    Est-ce une vierge qui m’attire,
    Pâle sous l’or de ses cheveux ?
    J’aime et j’étouffe et ne sais dire,
    Ô mon cœur fou, ce que tu veux.

    Pourquoi, quand les chauds couchants roses
    Exaltent les fleurs dans les...

  • Oh ! les longs, longs baisers sur sa bouche et ses yeux,
    La chair mordue ainsi qu’un fruit délicieux,
    Et le matin, le lent enroulement des tresses,
    Les regards échangeant leurs dernières caresses,
    Les angoisses, le soir, situ ne venais pas,
    Ou les bonds de mon cœur quand j’entendais tes pas :
    Vision du passé, pourquoi m’être apparue
    Devant les deux...

  • L’âme écoute toute ravie
    Le rossignol qui chante en vous :
    Vous feriez adorer la vie,
    En l’éclairant de vos yeux doux.

    Votre voix a le charme étrange
    Les appels d’oiseau dans les bois :
    Vous rappelez cette mésange
    Qu’un pauvre moine d’autrefois

    Écouta pendant cent années
    Chanter au fond d’une forêt :
    Les fleurs pleuraient...