• Sous un souffle qu’emplit l’aube des premiers temps
    S’évapore la terre aux verdures nouvelles ;
    L’arbre enivré s’incline aux bords des clairs étangs ;
    Et les feuilles au ciel battent comme des ailes
    Dans l’âme fraîche du printemps.

    Sur l’herbe où la rosée a trempé leurs pieds...

  • La coupe où sans regret tu versas l’affreux vin
    Reste la coupe d’or d’un échanson divin !

    La nuit qui scintillait quand nous nous séparâmes
    Reste l’ombre étoilée où montaient nos deux âmes !

    La fleur qui mourra loin de tes profonds cheveux
    Reste l’œillet béni qui servait les aveux !

    Le vent qui passe et prend le baiser qu’on oublie
    Reste le messager...

  • Éclosion des jeunes âmes !
    Bien d’autres rêves ont peuplé
    Mon cœur, madame, et l’ont gonflé,
    Depuis qu’enfants nous nous croisâmes.
    Amour naïf vite envolé !
    Meurt-elle en nous la rêverie
    Qui berçait les cœurs enfantins ?
    Non, je revois l’île fleurie,
    Les varangues et les jardins.
    Bien séparés sont nos destins !
    Mais jeune fille...

  •  
    Les temps sont arrivés, des vieilles prophéties !
    Ils sont venus, les jours d'universelle horreur !
    Les ombres du néant, d'heure en heure épaissies,
    S'allongent sur nos fronts écrasés de terreur.

    Nous les vivons, les jours d'agonie et de râle !
    À l'orient, jamais plus de matins nouveaux !
    Comme le bronze noir qui ferme les caveaux,
    Le sol...

  • Quelle nuit, ô mon âme ! et quel silence ! Écoute !
    La diane héroïque hier encor battait !
    Voilà donc la rançon que le pain blanc nous coûte !
          Contemple Paris qui se tait !

    Superbe, aux longs échos de ses vingt citadelles,
    Hier encor Paris, debout sur ses remparts,
    Caressait des canons fidèles....

  •  

    I

    Nour-Eddour, le voyant de l'avenir, un soir,
    Comme il avait coutume, était venu s'asseoir
    Au seuil de son logis, en face du Bosphore.
    Tout au fond d'une extase où l'esprit s'évapore,
    Dans l'ombre, sur un tertre accroupi, fixement
    Il regardait un astre au fond du firmament,
    Et parlait haut. - La nuit gravissait les terrasses
    Des...

  •  
    Bâti par des mains inconnues,
    Un féerique palais, longtemps,
    Ouvre au vent frais des avenues
    Ses fenêtres à deux battants.

    À chaque porte, en grand costume,
    Sonnant du cor sur l'escalier,
    Un page, selon la coutume,
    Vante le seuil hospitalier.

    Le suzerain de ce domaine,
    Dans les salles de son palais,
    En riche apparat se...

  •  
    I

    Un ange sur mon front déploya sa grande aile ;
    Une ombre lentement descendit vers mes yeux ;
    Et sur chaque paupière un doigt impérieux
    Vint alourdir la nuit plus épaisse autour d'elle.
    Un ange lentement déploya sa grande aile,
    Et sous ses doigts de plomb s'enfoncèrent mes yeux.
    Puis tout s'évanouit, douleur, efforts, mémoire ;
    Et je...

  •  
    I

    Hommes des jours tardifs en germe dans le temps !
    Sous l'amoncellement des siècles, dont l'écume
    Vous rongera plus tard aux froideurs de la brume
    Où vont s'évanouir les peuples haletants,
    Ô vous, qui trouverez ceci ! Races futures !
    Hommes des jours lointains, mais promis aux tortures
    Anciennes ! ô mortels ! ô martyrs comme nous
    Du mal...

  •  
    L'esprit mystérieux au vague ou bref chemin
    Qui par moments nous prête un regard surhumain,
    Le rêve, m'a montré ce que n'a vu personne :
    C'était, sous un air lourd qui jamais ne frissonne,
    Un continent couvert d'arbres pétrifiés,
    Si puissants, que jadis lorsque vous triomphiez,
    Vieux chênes ! Auprès d'eux vos chefs les plus robustes
    Et les plus...