• Mets-moi dessus la mer d'où le soleil se lève,
    Ou près du bord de l'onde où sa flamme s'éteint ;
    Mets-moi au pays froid, où sa chaleur n'atteint,
    Ou sur les sablons cuits que son chaud rayon grève ;

    Mets-moi en long ennui, mets-moi en joie brève,
    En franche liberté, en servage contraint ;
    Soit que libre je sois, ou prisonnier rétreint,
    En assurance,...

  • L'Amour qui me tourmente
    Je trouve si plaisant
    Que tant plus il s'augmente
    Moins j'en veux estre exemt :
    Bien que jamais le somme
    Ne me ferme les yeux,
    Plus amour me consomme
    Moins il m'est ennuyeux.

    Toute la nuit je veille
    Sans cligner au sommeil,
    Remembrant la merveille
    Qui me tient en éveil,
    Me representant celle...

  • Mais à qui mieux pourroy-je presenter
    Ces petits chants, qu'à toy, douce Meline,
    Mon Eraton, qui la fureur divine
    Souflas en moy, qui me les fit chanter ?

    Tu m'i verras une foix enchanter
    De ta rigueur le souci qui me mine
    Une autre fois en ta douceur benine
    Tu me verras gayement contenter.

    Icy lisant, l'amour qui me tourmente,
    Tu...

  • Quand je te vis entre un millier de Dames,
    L'elite et fleur des nobles, et plus belles,
    Ta resplendeur telle estoyt parmy elles,
    Quelle est Venus sur les celestes flames.

    Amour adonq' se vangea de mille ames
    Qui luy avoyent jadis esté rebelles,
    Telles tes yeux eurent leurs estincelles
    Par qui les cueurs d'un chacun tu enflames.

    Phebus...

  • (écrit après la Saint-Barthélemy)

    Pauvres Cors où logeoyent ces esprits turbulans,
    Naguieres la terreur des Princes de la terre,
    Mesmes contre le ciel osans faire la guerre,
    Deloiaux, obstinez, pervers et violans :

    Aujourdhuy le repas des animaux volans
    Et rampans charogniers, et de ces vers qu'enserre
    La puante voirie, et du peuple qui erre...

  • La froidure paresseuse
    De l'yver a fait son tems :
    Voici la saison joyeuse
    Du délicieux printems.

    La terre est d'herbes ornée,
    L'herbe de fleuretes l'est ;
    La fueillure retournée
    Fait ombre dans la forest.

    De grand matin la pucelle
    Va devancer la chaleur
    Pour de la rose nouvelle
    Cueillir l'odorante fleur ;

    Pour...

  • Depuis qu'Amour ma poitrine recuit,
    Bouillante au feu de sa plus chaude braise
    De mille ennuis en immortel malaise,
    Dont maint souci dans moy l'un l'autre suit :

    J'oubli tout bien pour un bien qui me fuit,
    Par un plaisir dont la douceur m'embraise,
    Si bien qu'il faut que nul autre me plaise,
    Et qu'en luy seul je preigne mon deduit.

    Mais...

  • Viens, mort, à mon secours viens ;
    Ô mort, secours, je t'en prie.
    - Je t'oy, je viens, que veux-tu ?
    - Ô mort, je suis tout en feu ;
    J'attends de toi guérison.
    - Et qui t'a mis tout en feu ?
    - L'enfant qui porte brandon.
    - Que puis-je faire pour toi ?
    - Fais-moi mourir je t'en prie.
    - Mourir te fais tous les jours.
    - Non, fais que j'aie...

  • Prete l'oreille à ma complainte, Seigneur Dieu :
    Veuilles entendre le murmure de ma pensée.
    Ma clameur ois, comme mon Roi, comme mon Dieu. Si te prierai.

    De matin doncques ma voix, Sire, tu orras :
    De matin doncques j'appretrai mon oraison
    Toute vers toi, d'où regardant ma délivrance j'attendrais :

    Si tu es Dieu à qui forfait ne plaira point :
    Si...

  • Mere d'Amour, Venus la belle,
    Que n'as tu mis en ta tutelle
    Du beau may le mois vigoureux ?
    Si l'avril a pris ton coeur tendre,
    Au moins ton fils Amour dust prendre
    Du doux May le temps amoureux.

    May, qui non seulement devance,
    Avril en douceur et plaisance,
    Mais qui seul encore vaut mieux
    Que tout le reste que l'an dure,
    Gâté de...