• Certain Païen chez lui gardait un Dieu de bois,
    De ces Dieux qui sont sourds, bien qu'ayants des oreilles.
    Le païen cependant s'en promettait merveilles.
    Il lui coûtait autant que trois.
    Ce n'étaient que voeux et qu'offrandes,
    Sacrifices de boeufs couronnés de guirlandes.
    Jamais Idole, quel qu'il fût,
    N'avait eu cuisine si grasse,
    Sans que pour tout ce...

  • La Bique allant remplir sa traînante mamelle
    Et paître l'herbe nouvelle,
    Ferma sa porte au loquet,
    Non sans dire à son Biquet :
    Gardez-vous sur votre vie
    D'ouvrir que l'on ne vous die,
    Pour enseigne et mot du guet :
    Foin du Loup et de sa race !
    Comme elle disait ces mots,
    Le Loup de fortune passe ;
    Il les recueille à propos,
    Et les garde...

  • Que cette glace est belle,
    Qu'elle est nette et fidèle :
    Elle exprime un visage, et ne le flatte point.
    Mais je porte dans l'âme
    Un cristal qui m'enflamme :
    Dieu me sert de miroir, de juge et de témoin.

    Mon miroir quoiqu'utile
    Est un miroir stérile :
    Il ne me fait rien voir que ce qu'il prend de moi.
    Dieu, miroir très sublime,
    En m'...

  • Mon centre est le néant, c'est un vrai lieu de paix.
    L'imposture et l'erreur ne s'y trouvent jamais.
    Lorsque je ne veux rien, l'ennemi se retire,
    Il ne sait où me prendre, il ne sait que me dire.
    Quand il veut raisonner, je ne l'écoute pas,
    Quand il flatte mes sens, je sais me tenir bas.
    Que ce néant est beau ! qu'il est doux et tranquille.
    Ce néant me...

  • Cette claire fontaine,
    Coulant de veine en veine,
    Vient du sein de la mer,
    Et par d'autres canaux rejoint son centre cher.

    Et d'où viens-tu, mon âme ?
    Je me ravis, je pâme :
    C'est de Dieu que tu viens,
    Abîme-toi dans Dieu, l'océan de tes biens.

    Comme cette eau, tu coules,
    Comme cette eau, tu roules,
    Mais par des sentiers faux....

  • Très doux zéphyr qui caresses les fleurs,
    Viens modérer les trop vives chaleurs
    Que je souffre en mon coeur pour le Dieu qui t'anime :
    La douceur de sa paix en ta fraîcheur s'exprime.

    Non, Dieu n'est point dans un orage affreux
    Qui brise un roc et le cèdre orgueilleux ;
    Sans troubler son amour s'insinue en notre âme,
    Et sans la travailler, la...

  • L'homme n'a rien du temps que l'instant qu'il possède,
    Quand le temps est perdu, sa perte est sans remède :
    Après tant d'embarras, tant de peine et de bruit,
    On se trouve à la fin et sans temps et sans fruit.
    Chacun se donne en proie au siècle qui l'entraîne,
    Au plaisir qui l'amuse, au dessein qui le gêne,
    Et comme s'il régnait une fatale loi,
    Chacun...

  • Rosine avecques moy pourroit parfaitement
    Comme en un abrégé representer le monde,
    Ma constance et ma foy, ferme immuable et ronde,
    Retient les qualitez du plus bas element.

    Le feu dedans mon coeur flambe eternellement,
    Des larmes en mes yeux un Ocean abonde,
    Et voylà qu'en mon sein la troupe vagabonde
    Des vents de mes souspirs haleine incessamment...

  • Quand nature forma d'un art industrieus
    Cette beauté divine à nulle autre seconde,
    Elle prit dans des feux qui font tousjours la ronde
    Par le cercle estoilé, pour en faire ses yeux.

    Elle mit le croissant sur son front gracieus,
    Elle emprunta les rais du grand flambeau du monde,
    Afin d'en colorer sa belle tresse blonde :
    Bref, elle butina tout le...

  • À de vagues desseins l'homme est toujours en proie,
    Son instabilité ne meurt qu'avecque lui,
    Et nous voyons, Seigneur, que sa plus douce joie
    Dégénère souvent en son plus grand ennui.

    Bien que vers son bonheur constamment il s'empresse,
    Bien qu'en ce seul objet il mette ses plaisirs,
    Comme c'est hors de vous qu'il le cherche sans cesse,
    Il n'est...