• A qui est plus un Amant obligé
    Ou a Amour, ou vrayement a sa Dame  ?
    Car son service est par eulx redigé
    Au ranc de ceulx, qui ayment los, & fame.

    À luy il doibt le cueur, a elle l’Ame,
    Qui est autant, comme a tous deux la vie  :
    L’un a l’honneur, l’autre a bien le conuie  :
    Et toutesfois voicy un tresgrand poinct,
    Lequel me rend ma pensee...

  • La pluie fit tôt son entrée ce soir,
    Et bientôt s'éveilla le vent bougon,
    Qui de dépit déchira la cime des ormes,
    Et fit de son mieux pour courroucer le lac.
    J'écoutais, le cœur prêt à se rompre,

    La furtive Porphyria qui entrait ; aussitôt
    Elle referma la porte sur le froid et la tempête,
    Et s'agenouilla ; le foyer sans joie s'embrasa
    Et la...

  • Vous craignez le Désir, ô compagnons d’Ulysse.
    Aveugles et muets, l’âme close au péril
    De la voix qui ruisselle et du rire subtil,
    Vous rêvez des foyers qui recueillent l’exil
    Aux pieds lassés. Moi seul, ô compagnons d’Ulysse,
    Moi seul ai dédaigné la fraude et l’artifice,
    Moi seul ose l’Amour et le divin Péril.

    Dénouant leurs cheveux fluides, les...

  • À seize ans, pauvre et timide
    Devant les plus frais appas,
    Le cœur battant, l’œil humide,
    Je voulais et n’osais pas,
    Et je priais, et sans cesse
    Je répétais dans mes vœux :
    « Jésus ! rien qu’une maîtresse,
    Rien qu’une maîtresse… ou deux ! »

    Lors une beauté, qui daigne
    M’agacer d’un air moqueur,
    Me dit : « Enfant, ton cœur saigne,...

  •  
    Je t’ensevelis pour jamais,
    Idole si mièvre et si fausse :
    Dans l’oubli j’ai creusé la fosse
    Oblongue et froide où je te mets.

    Ne crois pas que sur mes sommets
    Jusqu’à moi ton spectre se hausse !
    Je t’ensevelis pour jamais,
    Idole si mièvre et si fausse.

    Je suis tout seul au monde, mais
    Contre moi-même je m’adosse,
    Et l’...

  •  
    À José Maria de Heredia.

    Sous les pleurs du jet d’eau qui bruit dans la vasque,
    Armide étreint les flancs du héros enchaîné.
    Près d’Ares, qui de sang ruisselle, Dioné
    Mêle ses fins cheveux aux crins rudes d’un casque

    Donc, ô femme, toujours ton caprice fantasque
    Aux boucles des brassards s’accroche fasciné.
    Ton orgueil, par le glaive...

  •  
    Au courant de l’amour lorsque je m’abandonne,
    Dans le torrent divin quand je plonge enivré,
    Et presse éperdument sur mon sein qui frissonne
    Un être idolâtré.

    Je sais que je n’étreins qu’une forme fragile,...

  • X

    Quand l’amant sortit
    (J’entendis la porte)
    Quand l’amant sortit
    Elle avait souri…

    Mais quand il rentra
    (J’entendis la lampe)
    Mais quand il rentra
    Une autre était là…

    Et j’ai vu la mort
    (J’entendis son âme)
    Et j’ai vu la mort
    Qui l’attend encore…

    X

    Quand l’amant sortit...

  • À qui plus est un Amant obligé :
    Ou à Amour, ou vraiment à sa Dame ?
    Car son service est par eux rédigé
    Au rang de ceux qui aiment lauds, et fame.

    À lui il doit le coeur, à elle l'Âme,
    Qui est autant comme à tous deux la vie ;
    L'un à l'honneur, l'autre à bien le convie ;
    Et toutefois voici un très-grand point,
    Lequel me rend ma pensée...

  • Voyez au vif le portrait d'un amant :
    Je pleure et ris, je loue et vitupère,
    Un même objet m'est funèbre et prospère,
    Je perds courage et je vais m'animant.

    Mon coeur, mes yeux s'en vont partout semant
    Et feux, et flots ; mon âme est le repaire
    D'espoir et peur ; jamais je ne tempère
    Mon froid, mon chaud, qui vont ensemblement.

    Je sens...