• On dit : — Soyez prudents. — Puis vient ce dithyrambe :
    «… Qui veut frapper Néron
    Rampe, et ne se fait pas précéder d’un ïambe
    Soufflant dans un clairon.

    » Souviens-toi d’Ettenheim et des pièges célèbres ;
    Attends le jour marqué.
    Sois comme Chéréas qui vient dans les ténèbres,
    Seul, muet et masqué.

    » La prudence conduit au but qui sait la...

  • Où donc est le bonheur ? disais-je. — Infortuné !
    Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l’avez donné.

    Naître, et ne pas savoir que l’enfance éphémère,
    Ruisseau de lait qui fuit sans une goutte amère,
    Est l’âge du bonheur, et le plus beau moment
    Que l’homme, ombre qui passe, ait sous le firmament !

    Plus tard, aimer, garder dans son cœur de jeune homme
    Un...

  • IX

    Ils nous apportent Dieu dans une diatribe.
    Ils sont le prêtre, ils sont le reître, ils sont le scribe.
    Regardez écumer leur prose de bedeau.
    Chacun d'eux mêle un cri d'orfraie à son credo,
    Souligne avec l'estoc sa prière, et ponctue
    Ses oremus avec une balle qui tue.
    Voyez, leur chair est faible et leur esprit est prompt...

  • Si l’on vous dit que l’art et que la poésie
    C’est un flux éternel de banale ambroisie,
    Que c’est le bruit, la foule, attachés à vos pas,
    Ou d’un salon doré l’oisive fantaisie,
    Ou la rime en fuyant par la rime saisie,
    Oh ! ne le croyez pas !

    Ô poëtes sacrés, échevelés,...

  • III

    Par une sérénade on fête ma clémence.
    A mort ! est le refrain de la douce romance.
    Les journaux prêtres font un vacarme effrayant.
    - Cet homme ose défendre un ennemi fuyant !
    Quelle audace ! il nous croit honnêtes ! il nous brave ! -
    Les maîtres ont la rage et les valets la bave.
    Meute de sacristains, meute de...

  •  
    Parfois c’est un devoir de féconder l’horreur.
    Il convient qu’un feu sombre éclaire un empereur.
    J’ai fait Les Châtiments. J’ai dû faire ce livre.
    Moi que toute blancheur et toute grâce enivre,
    Je me suis approché de la haine à regret.
    J’ai senti qu’il fallait, quand l’honneur émigrait,
    Mettre au-dessus du crime, en une ombre sereine,
    Le...

  • IV

    O ville, tu feras agenouiller l'histoire.
    Saigner est ta beauté, mourir est ta victoire.
    Mais non, tu ne meurs pas. Ton sang coule, mais ceux
    Qui voyaient César rire en tes bras paresseux,
    S'étonnent : tu franchis la flamme expiatoire,
    Dans l'admiration des peuples, dans la gloire,
    Tu retrouves, Paris, bien plus que tu ne...

  • II

    Pour la sinistre nuit l'aurore est un scandale ;
    Et l'Athénien semble un affront au Vandale.
    Paris, en même temps qu'on t'arnaque, on voudrait
    Donner au guet-apens le faux air d'un arrêt ;
    Le cuistre aide le reître ; ils font cette gageure,
    Déshonorer la ville héroïque ; et l'injure
    Pleut, mêlée à l'obus, dans le...

  • III

    Mais où donc ira-t-on dans l'horreur ? et jusqu'où ?
    Une voix basse dit : Pourquoi pas ? et Moscou ?

    Ah ! ce meurtre effrayant est un meurtre imbécile !
    Supprimer l'Agora, le Forum, le Poecile,
    La cité qui résume Athènes, Rome et Tyr,
    Faire de tout un peuple un immense martyr,
    Changer le jour en nuit, changer l'...

  •   
    Il fait la noce éternelle.
    La table est dans la tonnelle ;
    Mort ivre, il tombe dessous ;
    Et, c’est là sa réussite,
    Il va, quand il ressuscite,
    Au paradis pour six sous.

    Rire et boire, et c’est la vie !
    On régale ; on se convie
    Sur le vieux comptoir de plomb ;
    Toujours fête ; et le dimanche
    Tient le lundi par la manche ;...