• Églantier, rosier de l’Eden,
    Les habitants des capitales
    Te greffent de leurs mains brutales
    Pour faire honneur à leur jardin.

    Pour le raffiné citadin
    Ta rose ouverte et tes pétales
    Dans leurs simplicités natales
    Ne méritent que le dédain.

    Aussi, pourquoi, fleur sans malice,
    En ouvrant tout grand ton calice
    Nous montrer le fond de...

  • Lorsque je serai mort, oh ! je vous en convie,
    Si vous vous rappelez une heure de ma vie,
    Amis, où d’amitié j’aie oublié la loi,
                      Oubliez-moi,

    Mais si quelqu’un de vous, entonnant ma louange,
    Dit : Il n’est plus, l’ami, dont la parole étrange
    Parfois pour consoler avait des mots si doux,
                      Souvenez-vous.

    Si l’...

  • Pierre était un bûcheron
    Qui n’avait que sa cognée
    Et tous les ans environ
    Ajoutait à sa lignée.

    Ni plus ni moins ignorant
    Que sa femme Marguerite,
    Il n’était ni gros ni grand
    Ni travailleur émérite.

    Il faisait mince fagot,
    Il gagnait salaire mince
    Et pour allaiter un prince
    On n’eût pas choisi Margot ;

    Aussi le père...

  • Un matin du premier printemps,
    Sur les fleurs naissantes les anges
    Baissaient les yeux de temps en temps
    Pour les voir sortir de leurs langes.
     
    Ils demeurèrent interdits
    Devant les merveilles écloses,
    Le grand pommier du Paradis
    Était tout couvert de fleurs roses.

    À l’ombre des rameaux coquets
    Ève éblouie était assise,
    Perdue...

  • Ô poète, s’il faut que le cœur du marin
                Soit cuirassé d’un triple airain,
    Au paysan qui fait métier de labourage
                Il faut aussi bien du courage,

    Aux morsures du vent aigre et du flot amer
                Si la vie est rude à la mer,
    Par la neige et le vent et sous l’âpre froidure,
                À terre aussi la vie est dure.

    ...
  • Ami, vous m’avez dit que, par-delà les monts,
    Vous pensez tous les jours à moi ; nous nous aimons.
    Vous êtes mon cadet d’un peu plus d’une année,
    Mais nos âmes sont sœurs et la vôtre est l’aînée,
    La plus grave ; leurs goûts, leus dédains, leurs douceurs
    Se ressemblent, ainsi qu’il convient à des sœurs.
    Elles ont même joie et même inquiétude,
    Même...

  • Marie a dix-huit ans du mois de Février.

         Son linge est dans l’armoire, on peut la marier,
    Avant l’août, si l’on veut. C’est un beau brin de fille,
    Un peu haute à la main, brune. C’est de famille.

         Ses gens vont devant eux au sentier de l’honneur
    Sans un nuage au front, sans un brouillard au cœur.
    Leurs ancêtres, rompus à la besogne austère,...

  •      Il est loin du soleil, de l’air et des lumières,
    De simples paysans cachés dans leurs chaumières,
    Tristement confinés dans un sombre milieu,
    Mal nourris, mal vêtus, pauvres, mais craignant Dieu,
    Généreux sans emphase et de leur nécessaire
    Faisant souvent deux parts et donnant la plus claire,
    Bons fils, époux aimés et pères respectés.
    Patriarches...

  • J’ai des arbres, remplis de bois mort et de trous,
    Gélifs, noueux, tortus, bossus, couverts d’écailles,
    Tronqués et plus moussus que de vieilles murailles,
    Emmantelés de lierre et hérissés de houx.

    Vieux serviteurs bourrus. Le plus rugueux de tous,
    C’est Jean, mon bûcheron. Cet homme sans entrailles
    Surveille les halliers et sonde les broussailles :
    ...

  • Au coin du foyer triste et dont la flamme est morte
    Le paysan grelotte et songe tristement ;
    Il sent sur son épaule, ainsi qu’un châtiment,
    Peser la Pauvreté qu’il héberge et supporte.

    Ses reins se sont courbés sous la charge trop forte.
    Il voudrait la chasser de son toit, mais comment ?
    Qui le délivrera de l’éternel tourment ?
    — C’est moi, dit la...