• Vague et noyée au fond du brouillard hiémal,
    Mon âme est un manoir dont les vitres sont closes,
    Ce soir, l'ennui visqueux suinte au long des choses,
    Et je titube au mur obscur de l'animal.

    Ma pensée ivre, avec ses retours obsédants
    S'affole et tombe ainsi qu'une danseuse soûle ;
    Et je sens plus amer, à regarder la foule,
    Le dégoût d'exister qui me...

  • Quand je suis à tes pieds, comme un fidèle au temple
    Immobile et pieux, quand fervent je contemple
    Ta bouche exquise ou flotte un sourire adoré,
    Tes cheveux blonds luisant comme un casque doré,
    Tes yeux penchés d?où tombe une douceur câline,
    Ton cou svelte émergeant d?un flot de mousseline,
    L?ombre de tes longs cils sur ta joue et tes seins
    Où mes baisers...

  • Nous sommes les Puissants - soldat, rhapsode ou mage,
    Nous naissons pour l?orgueil de voir, dompteurs altiers,
    Les siècles asservis se coucher à nos pieds ;
    Et c?est nous qui forgeons, surhumains ouvriers,
    Tour à tour, la vieille âme humaine à notre image.

    Nous sommes les Puissants exécrés ou bénis,
    Fronts nimbés d?auréole ou brûlés d?anathème.
    Le sort...

  • Le ciel pleure ses larmes blanches
    Sur les jours roses trépassés ;
    Et les amours nus et gercés
    Avec leurs ailerons cassés
    Se sauvent, frileux, sous les branches.

    Ils sont finis les soirs tombants,
    Rêvés au bord des cascatelles.
    Les Angéliques, où sont-elles !
    Et leurs âmes de bagatelles,
    Et leurs coeurs noués de rubans ?...

    ...

  • Le silence descend en nous,
    Tes yeux mi-voilés sont plus doux ;
    Laisse mon coeur sur tes genoux.

    Sous ta chevelure épandue
    De ta robe un peu descendue
    Sort une blanche épaule nue.

    La parole a des notes d'or ;
    Le silence est plus doux encor,
    Quand les coeurs sont pleins jusqu'au bord.

    Il est des soirs d'amour subtil,
    Des...

  • En printemps, quand le blond vitrier Ariel
    Nettoie à neuf la vitre éclatante du ciel,
    Quand aux carrefours noirs qu?éclairent les toilettes
    En monceaux odorants croulent les violettes
    Et le lilas tremblant, frileux encor d?hier,
    Toujours revient en moi le songe absurde et cher
    Que mes seize ans ravis aux candeurs des keepsakes
    Vivaient dans les grands murs...

  • Octobre est doux. - L'hiver pèlerin s'achemine
    Au ciel où la dernière hirondelle s'étonne.
    Rêvons... le feu s'allume et la bise chantonne.
    Rêvons... le feu s'endort sous sa cendre d'hermine.

    L'abat-jour transparent de rose s'illumine.
    La vitre est noire sous l'averse monotone.
    Oh ! le doux "remember" en la chambre d'automne,
    Où des trumeaux...

  • L'heure comme nous rêve accoudée aux remparts.
    Penchés vers l'occident, nous laissons nos regards
    Sur le port et la ville, où le peuple circule,
    Comme de grands oiseaux tourner au crépuscule.
    Des bassins qu'en fuyant la mer à mis à sec
    Monte humide et puissante une odeur de varech.
    Derrière nous, au fond d'une antique poterne,
    S'ouvre, nue et déserte, une...

  • Comme une grande fleur trop lourde qui défaille,
    Parfois, toute en mes bras, tu renverses ta taille
    Et plonges dans mes yeux tes beaux yeux verts ardents,
    Avec un long sourire où miroitent tes dents...
    Je t?enlace ; j?ai comme un peu de l?âpre joie
    Du fauve frémissant et fier qui tient sa proie.
    Tu souris... je te tiens pâle et l?âme perdue
    De se sentir au...

  • I

    Ô Versailles, par cette après-midi fanée,
    Pourquoi ton souvenir m'obsède-t-il ainsi ?
    Les ardeurs de l'été s'éloignent, et voici
    Que s'incline vers nous la saison surannée.

    Je veux revoir au long d'une calme journée
    Tes eaux glauques que jonche un feuillage roussi,
    Et respirer encore, un soir d'or adouci,
    Ta beauté plus touchante au...