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    Canaris ! Canaris ! nous t’avons oublié !
    VICTOR HUGO, Chants du Crépuscule.

    « Nuages qui passez, répondez-nous ! réponds,
    O pêcheur à la ligne installé sous les ponts !
    Fleuve, réponds ! Réponds, bois ! Réponds aussi, pierre,
    Qu’est devenu Sipière ?

    Nous avons, comme en juin, comme en octobre, été
    Sublimes, assommant...

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    À Arthur Bautier.

    J’ai rêvé la douceur des joyeuses caresses
    Près de la femme aimée, au grand cœur, aux beaux yeux ;
    Les femmes, secouant les trésors de leurs tresses,
    À mon noir abandon m’ont livré soucieux.

    J’ai désiré la gloire. Ô haines vengeresses !
    La gloire, dont j’aimais le spectre radieux,
    A détourné de moi son bruit...

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    Strasbourg en flammes ; Toul qui se change en brasier ;
    Metz criant au secours dans un cercle d’acier ;
    Verdun où les obus s’abattent sans relâche ;
    Bitche et Phalsbourg poussant des râles ; Nancy lâche,
    O douleur ! Wissembourg dont on dit : « C’était là ! »
    Champ lugubre où la mort joyeuse amoncela
    Tant d’hommes forts et beaux, spectres qu’échevelée...

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    Vous n’avez pas de flair, Ollivier. C’est dommage.
    Comment ! Vous vous mettez à changer de plumage
    Juste à temps pour vous faire appeler renégat ;
    Quand il ne reste plus même un peu de nougat
    Sur la table où Rouher a joué des mâchoires !
    Rien sur la nappe, rien même dans les armoires,
    O Machiavel deux, on a tout nettoyé !
    Eh quoi ! C’est pour l...

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    On n’a pas eu besoin de les chasser. D’eux-mêmes
    Ils se sont esquivés, furtifs, grotesques, blêmes,
    La main à leur derrière ainsi qu’un bouclier,
    Perdant, l’un son toupet, l’autre son râtelier.
    Dégringolant, soufflant, suant à grosses gouttes,
    Ils se sont culbutés le long des grandes routes,
    À défaut du remords poursuivis par la peur,
    Regardant...

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    Voici le soir : pareils au clair de lune,
    Tes yeux charmants rêvent sous tes cils longs ;
    L’air est léger ; si tu veux, nous allons
    Dormir au bord de la mer, sur la dune.
     
    Un chant s’élève entendu par mon cœur,
    Un chant d’amour exhalé par ton âme.
    Triste et bien doux, vers le ciel tout en flamme
    Qui semble prêt à mourir de langueur....

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    À Gustave Flaubert.

    Ainsi mourut la fille d’Hamilcar
    pour avoir touché au manteau de Tanit.

    Quand elle eut, de sa main curieuse, touché
    Au manteau de lumière et d’étoiles broché ;
    Quand ses yeux éperdus et troublés, que dilate
    Le désir, eurent bu l’azur et l’écarlate
    Du voile redoutable aux regards...

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    C’est un château galant, trianon germanique,
    Qu’un bottier de Cassel, laissant là sa manique,
    Construisit en l’honneur des grâces et des ris.
    Les fourrés sont épais, les sentiers sont fleuris ;
    L’ombre est douce, l’eau court dans le parc, les statues
    Agacent le regard, blanches et court-vêtues.
    On voit bondir parfois de beaux cerfs familiers,
    ...

  • Que l'on m'enterre un matin
    De soleil, pour que nul n'essuie,
    Suivant mon cortège incertain,
    De vent, de bourrasque ou de pluie.
    Car, n'ayant jamais fait de mal
    A quiconque ici, je désire,
    Quand mon cadavre sépulcral
    Aura la pâleur de la cire,
    Ne pas, en m'en allant, occire
    Des suites d'un rhume fâcheux
    Quelque pauvre dévoué sire...

  • C'est toi, chère exilée ! Oh ! Laisse que j'adore
    Ta figure divine où rayonne l'aurore,
    Ô république, amour vivace de nos coeurs !
    La fosse où, dix-huit ans, de sinistres vainqueurs
    T'ont murée, est ouverte, et tu viens, souriante,
    Claire étoile aux rayons de qui tout s'oriente !
    Les tombeaux ne t'ont rien laissé de leur pâleur ;
    Tu viens la lèvre fière et le...