• Ce n'est pas moy qui veut d'un feint ouvrage
    Par mille vers farder sa passion,
    Ou en flatant plaire à l'affection
    De l'amoureux inconstant et vollage :

    Ce n'est pas moy, qui, surpris d'une rage,
    Trouble, insensé, de sa conception
    Le vif dessein, ny doit l'intention
    Est de se prendre en un si doux naufrage.

    Ce n'est pas moy qui tasche de...

  • En quel fleuve areneux jaunement s'écouloit
    L'or, qui blondist si bien les cheveux de ma dame ?
    Et du brillant esclat de sa jumelle flamme,
    Tout astre surpassant, quel haut ciel s'emperloit ?

    Mais quelle riche mer le coral receloit
    De cette belle levre, où mon desir s'affame ?
    Mais en quel beau jardin, la rose qui donne ame
    A ce teint vermeillet,...

  • D'où vient cela que l'envieuse rage,
    Qui les coeurs ronge, entreprend de blâmer
    Mes ans oisifs, et les vers un ouvrage
    D'un pauvre esprit et paresseux nommer,

    En m'accusant que je ne suis la trace,
    Étant dispos, de mes nobles aïeux,
    Qui ont conquis par la poudreuse place
    Et par le sang maint loyer vertueux ?

    Ou bien pourquoi me reprend-elle d...

  • Quand ma nymphette jolie
    Tourne devers moi ses yeux,
    Hors de moi s'enfuit ma vie,
    De moi navré furieux.
    Si une fois ma cruelle
    Détourne ses yeux de moi,
    Blessé de rage nouvelle,
    Je meurs en plus dur émôi.
    Que ferais-je donc pour vivre ?
    Quel jus reboirai-je, hélas ?
    Faudrait-il point que délivre
    Je me visse de ses lacs ?
    Ce...

  • Muses, adieu, et votre chant jazard !
    Adieu Phoebus, et ma fière déesse !
    Livres, adieu, adieu la tourbe espesse
    De mes amys, adieu tout jeu mignard !

    Adieu guiterre, adieu luth babillard,
    Toute harmonie et tout son de liesse,
    Gemmes, parfums, et toute gentillesse,
    Tout lieu hanté, tout ombrage à l'écart !

    Ainsy la mort, par une blanche voye...

  • Le plus aymable Roy de tous les Roys du monde,
    Si charmant et si beau qu'entre tous ses sujets
    S'il s'en peut rencontrer qui soient assez bien faits
    Pour avoir de son air, je veux que l'on me tonde,

    Ce Roy donc que je dis, en qui seul tout abonde,
    Dont l'Esprit chaque jour fait acquests et conquests,
    Dont le Coeur est si grand, enfin dont les hauts faits...

  • Sarrasin,
    Mon voisin,
    Cher amy,
    Qu'à demy
    Je ne voy,
    Dont, ma foy,
    J'ay dépit
    Un petit,
    N'es-tu pas
    Barrabas,
    Basiris,
    Phalaris,
    Ganelon
    Le félon,
    De sçavoir
    Mon manoir
    Peu distant,
    Et pourtant
    De ne pas,
    De ton pas
    Ou de ceux
    De tes deux
    Chevaux gris
    Mal nouris...

  • Stances

    Phebus a tres-bonne raison
    De se mettre en mestier pour mieux gagner sa vie ;
    Je voudrois qu'il lui prît envie
    De bâtir sur Parnasse une bonne maison :
    Elle seroit fort de saison ;
    Il est âgé, quoy qu'il en die,
    Et sans l'excès de sa folie

    Il seroit déja tout grison.
    Nous logeons tous à découvert :
    On n'a jamais bâty,...

  • Sonnet

    Ouy, c'est un Pedant, c'est un sot,
    Et le plus grand qui soit en France.
    Quand il profere une sentence,
    J'ayrnerois mieux qu'il fist un rot.

    Il est fils d'un petit ragot,
    Grand amateur de la jouvence,
    Qui perira par la potence
    S'il ne perit par le fagot.

    Il est fourbe dans les affaires ;
    Il sert aux amoureux...

  • (Énée vient d'annoncer à Didon qu'il doit repartir)

    Tandis qu'Aeneas enfila
    Le discours civil que voilà,
    Didon, de raison dépourvue,
    Ne jeta point sur lui la vue.
    Les yeux fichés sur le pavé,
    Le visage de pleurs lavé,
    En son esprit bourru la rage
    Faisait un étrange ravage.
    Enfin ses yeux elle darda
    Sur Énée, et le regarda
    ...