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    Et vers la mer d’Azof où la vague hennit,
    Un faucon se réveille et glapit dans son nid.
    Puis après le faucon, un hetman en son gîte,
    S’éveille au jour et prend sa lance moscovite.
    Il prend aussi son sabre et son poignard luisant
    Et sa ceinture d’or ciselée à Casan.
    —Ma sœur, allez chercher par sa bride d’écume,
    Près de la mer d’Azof, où le don...

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    Ainsi qu’une noire fumée,
    Au flanc des monts, toute une armée
    S’est dissipée avant la nuit.
    Avant le jour, pâle et sans bruit,
    Un cavalier passe dans l’ombre.
    Ah ! Que sa lance est froide et sombre !
    Sur son chemin retentissant,
    Qu’elle a déjà pleuré de sang !

    —Ma bonne lance polonaise,
    Qui ce matin tressaillais d’aise,
    ...

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    Et maintenant, c’est l’heure où la terre des gaules
    Gémit, comme une harpe, à l’ombre des vieux saules.
    Des fleuves murmurants, des lacs et des vallons,
    Des bois, des monts ombreux où nichent les aiglons,
    Et de l’anse des mers où la vague retombe
    Un immense soupir sort d’une immense tombe.
    Car ils sont morts, au loin, en mille champs épars,
    ...

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    Et, là-bas, mieux que les cavales
    Les hardis clairons hennissaient.
    Et les voix d’airain des cymbales
    Plus que le glaive frémissaient ;
    Comme des chœurs de suppliantes,
    Des cris de veuves et de sœurs,
    Qui, le sein nu, toutes sanglantes,
    Lèvent les mains vers les vainqueurs,
    Et chancelant dans son ivresse
    Le glaive écoutait ces...

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    Mais lui, pâle, mourant, tout courbé sur sa cime,
    Disait : -Amis, c’est bien. Remercions l’abîme,
    Et Longwood et son roc, et sa dure prison.
    Sans eux je n’eusse été qu’un fantôme sans nom ;
    Un orage qui gronde au plus haut de sa nue,
    Une fable ! Un mystère ! Une énigme inconnue.
    Mais, grâce à cet écueil où plonge mon regard,
    Ma vie ici s’...

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    Puissent les souvenirs de cette grande histoire
    Consoler notre siècle, orphelin de la gloire !
    Indolens rejetons d’aventureux soldats,
    Suivons aux bords du Nil leurs gigantesques pas,
    Dans ces déserts brûlans où montent jusqu’aux nues
    Des sépulcres bâtis par des mains inconnues.
    Soldats de l’Orient ! héros républicains,
    Qu’a brunis le soleil de...

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    Seul de tous les vaincus, couvert d’une ombre amie,
    Un arabe marchait dans la ville endormie ;
    Des emblêmes sanglans ornent son large sein,
    Sur son dos retentit le carquois abyssin,
    Et la peau d’un chakal, en turban déroulée,
    Agite sur son front sa gueule dentelée.
    Un qui vive perçant résonne ; l’étranger
    Précipite le pas de son...

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    C’était l’heure où jadis l’aurore au feu précoce
    Animait de Memnon l’harmonieux colosse ;
    Elle se lève encor sur les champs de Memphis,
    Mais la voix est éteinte aux lèvres de son fils ;
    Les siècles l’ont vaincu : l’œil reconnaît à peine
    Le géant de granit, étendu sur l’arène ;
    Il semble un de ces rocs que, de sa forte main,
    La nature a taillés...

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    Mais le rideau des nuits, lentement déroulé,
    Confond avec le sol l’horizon reculé ;
    Le bruit de la bataille expire, et dans la plaine
    Le silence pensif a repris son domaine.
    Alors les sons confus d’un étrange concert
    S’élèvent lentement ; l’immobile Désert
    Ecoute, comme un homme en sa vague insomnie,
    Des cascades du Nil la lointaine harmonie ;...

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    L’élite de l’armée en cinq corps se partage ;
    Tous ont brigué l’honneur d’un périlleux voyage ;
    Mais le chef a choisi, pour les plus grands travaux,
    Ces vétérans de fer, ces hommes sans rivaux,
    Qui, joyeux et légers sous le poids de l’armure,
    Souffrent avec courage et tombent sans murmure.
    A leur tête ont paru Lannes, Bon et Reynier ;
    Kléber, d...