Tu ne dors pas, souffle de vie,
Puisque l'univers vit toujours !
Sa sainte haleine vivifie
Les premiers et les derniers jours.
C'est toi qui répondis au Verbe qui te nomme,
Quand le chaos muet tressaillit comme un homme
Que d'une voix puissante on éveille en sursaut ;
C'est toi qui t'agitas dans l'inerte matière,
...
Le feu divin qui nous consume
Ressemble à ces feux indiscrets
Qu’un pasteur imprudent allume
Aux bord de profondes forêts;
Tant qu’aucun souffle ne l’éveille,
L’humble foyer couve et sommeille ;
ais s’il respire l’aquilon,
Tout à coup la flamme engourdie
S’enfle, déborde; et l’incendie
Embrase un immense horizon...
LE BARDE ANGLO-AMÉRICAIN.
Comme un monstre amphibie, enveloppé de brume,
Comme un léviathan, il avance, il écume,
Et tout tremble à sa voix, tout est saisi de peur !
Cyclope menaçant, aux poumons de vapeur,
De sa gueule enflammée il sort des étincelles ;
Et l’on doute s’il nage ; on croit qu’il a des ailes. —
Voyez-le soupirer : on dirait qu’...
Sylphe léger, fils des molles rosées,
J’aime à bondir sur les gazons en fleurs,
Et l’arc-en-ciel aux teintes irisées
Fait à mon front chatoyer ses couleurs ;
Sur un brin d’herbe, en passant, je me pose,
Et, sous mes pieds, bourdonnent les sillons ;
J’ai, pour tunique, une feuille de rose,
J’ai, pour voler, l’aile des papillons.
Quand...
J'aime dans tout esprit l'orgueil de la pensée
Qui n'accepte aucun frein, aucune loi tracée,
Par delà le réel s'élance et cherche à voir,
Et de rien ne s'effraie, et sait tout concevoir ;
Mais avec cet esprit j'aime une âme ingénue,
Pleine de bons instincts, de sage retenue,
Qui s'ombrage de peu, surveille son honneur,
De scrupules sans fin...
Le feu divin qui nous consume
Ressemble à ces feux indiscrets
Qu'un pasteur imprudent allume
Aux bord de profondes forêts;
Tant qu'aucun souffle ne l'éveille,
L'humble foyer couve et sommeille ;
ais s'il respire l'aquilon,
Tout à coup la flamme engourdie
S'enfle, déborde; et l'incendie
...
A Éva
I
Si l'Orgueil prend ton coeur quand le Peuple me nomme,
Que de mes livres seuls te vienne ta fierté.
J'ai mis sur le cimier doré du Gentilhomme
Une plume de fer qui n'est pas sans beauté.
J'ai fait illustre un nom qu'on m'a transmis sans gloire.
Qu'il soit ancien, qu'importe ? - Il n'aura de mémoire
Que du jour seulement où mon...
Esprit parisien ! démon du Bas-Empire !
Vieux sophiste épuisé qui bois, toutes les nuits,
Comme un vin dont l'ivresse engourdit tes ennuis,
Les gloires du matin, la meilleure et la pire;
Froid niveleur, moulant, aussitôt qu'il expire,
Le plâtre d'un grand homme ou bien d'un assassin,
Leur mesurant le crâne, et, dans leur vaste sein,
Poussant jusques au...
Ne mêle pas l'esprit aux choses de la chair.
Sache, aux moments secrets où le corps est en fête,
Redescendre à l'obscur délire de la bête.
Tumultueux et sourd et fort comme la mer,
Laisse gronder tes sens en orgues de tempête,
Et que sous l'onde en feu de tes baisers halète
L'orgueilleuse impudeur de la beauté parfaite.
Il faut qu'au fond des soirs...