Pontus de Tyard

  • Quel Dieu grava cette majesté douce
    En ce gai port d'une prompte allégresse ?
    De quel lis est, mais de quelle déesse
    Cette beauté qui les autres détrousse ?
    Quelle Sirène hors du sein ce chant pousse,
    Qui décevrait le caut Prince de Grèce ?
    Quels sont ces yeux...

  • O calme nuit, qui doucement compose
    En ma faveur l'ombre mieux animee
    Qu'onque Morphee en sa sale enfumee
    Peingnit du rien de ses Metamorphoses !

    Combien heureus les oeillets et les roses
    Ceingnoient le bras de mon ame espamee,
    Affriandant une langue affamee...

  • Je fumais tout en mon fort soupirer,
    Si chaudement, que le froid de son coeur
    Se distilla ; et l'ardente vigueur
    Lui fit d'Amour un soupir respirer.

    Mes yeux aussi, coutumiers d'attirer
    A leurs ruisseaux tant de triste liqueur,
    Amollissaient toute dure...

  • A peine avait seize ans, de la belle Vénus
    Et du Cyllénien la jeune et chère race,
    Quand, au temps que Phébus son plus long chemin trace,
    Dans un fleuve il voulut baigner ses membres nus.

    Mes souhaits, dit Salmace, ore sont advenus.
    Ce disant, elle court, entre...

  • Pere divin, sapience eternelle,
    Commencement et fin de toute chose,
    Ou en pourtrait indeleble repose
    De l'Univers l'Idee universelle.

    Voy de tes Raiz la plus belle estincelle
    Qui soit ça-bas en corps humain enclose,
    Que la trop fiere, impiteuse Parque ose...

  • J'ai tant crié, ô douce Mort, renverse
    Avec ce corps mon grief tourment sous terre,
    Que je me sens presque finir la guerre
    De l'espérance à mon désir diverse.

    Vois, Dame, vois, que les pleurs que je verse,
    Et les soupirs ardents, que je déserre
    Hors de...

  • Quand le désir de ma haute pensée,
    Me fait voguer en mer de ta beauté,
    Espoir du fruit de ma grand' loyauté,
    Tient voile large à mon désir haussée.

    Mais cette voile ainsi en l'air dressée,
    Pour me conduire au port de privauté,
    Trouve en chemin un flot de...

  • Mon âme est en vos mains heureusement étreinte
    Du plus gracieux noeud qu'oncq' beauté n'enlaça ;
    Une plus douce flèche oncques coeur ne blessa
    Que celle qui par vous dedans mon sang est teinte ;
    Plus docte poésie en votre esprit est peinte
    Qu'oncques sur Iélicon...

  • Oeil éloigné du Jour, qui te recrée,
    Comme, en l'obscur d'une nuée épaisse
    Peux-tu tirer une si vive espèce
    D'un corps, non corps, qui vainement se crée ?

    Coeur martelé, quelle Éride est entrée
    Dedans ton fort ? quelle pâle crainte est-ce,
    Qui d'engendrer...

  • L'ardent désir, qui d'espérer m'abuse,
    Si bien la voie au penser d'Amour montre,
    Que bien souvent devant moi je rencontre
    Celle pour qui tant, et tant de pas j'use.

    Mais quand ma douce, et cruelle Méduse
    Fait à mes yeux de soi si belle montre,
    L'esprit...