José-Maria de Heredia

  • La mousse fut pieuse en fermant ses yeux mornes ;
    Car, dans ce bois inculte, il chercherait en vain
    La Vierge qui versait le lait pur et le vin
    Sur la terre au beau nom dont il marqua les bornes.

    Aujourd'hui le houblon, le lierre et les viornes
    Qui s'enroulent...

  • L'ivoire est ciselé d'une main fine et telle
    Que l'on voit les forêts de Colchide et Jason
    Et Médée aux grands yeux magiques. La Toison
    Repose, étincelante, au sommet d'une stèle.

    Auprès d'eux est couché le Nil, source immortelle
    Des fleuves, et, plus loin, ivres...

  • A Emmanuel Lansyer.

    Il a compris la race antique aux yeux pensifs
    Qui foule le sol dur de la terre bretonne,
    La lande rase, rose et grise et monotone
    Où croulent les manoirs sous le lierre et les ifs.

    Des hauts talus plantés de hêtres convulsifs,
    Il...

  • Olim truncus eram ficulnus.
    HORACE.

    A Paul Arène.

    N'approche pas ! Va-t'en ! Passe au large, Étranger !
    Insidieux pillard, tu voudrais, j'imagine,
    Dérober les raisins, l'olive ou l'aubergine
    Que le soleil mûrit à l'ombre du verger ?

    J'y...

  • Las de poursuivre en vain l'Ophir insaisissable,
    Tu fondas, en un pli de ce golfe enchanté
    Où l'étendard royal par tes mains fut planté,
    Une Carthage neuve au pays de la Fable.

    Tu voulais que ton nom ne fût point périssable,
    Et tu crus l'avoir bien pour...

  • Le ciel est clair. La barque a glissé sur les sables.
    Les vergers sont fleuris et le givre argentin
    N'irise plus les prés au soleil du matin.
    Les boeufs et le bouvier désertent les étables.

    Tout renaît. Mais la Mort et ses funèbres fables
    Nous pressent, et,...

  • Mieux qu'aucun maître inscrit au livre de maîtrise,
    Qu'il ait nom Ruyz, Arphé, Ximeniz, Becerril,
    J'ai serti le rubis, la perle et le béryl,
    Tordu l'anse d'un vase et martelé sa frise.

    Dans l'argent, sur l'émail où le paillon s'irise,
    J'ai peint et j'ai sculpté...

  • Hujus nam domini colunt me Deumque salutant.
    CATULLE.

    Respecte, ô Voyageur, si tu crains ma colère,
    Cet humble toit de joncs tressés et de glaïeul.
    Là, parmi ses enfants, vit un robuste aïeul ;
    C'est le maître du clos et de la source claire.

    Et c'est...

  • Au pommeau de l'épée on lit : Calixte Pape.
    La tiare, les clefs, la barque et le tramail
    Blasonnent, en reliefs d'un somptueux travail,
    Le Boeuf héréditaire armoyé sur la chappe.

    A la fusée, un Dieu païen, Faune ou Priape,
    Rit, engainé d'un lierre à graines de...

  • Arrête ! Ecoute-moi, voyageur. Si tes pas
    Te portent vers Cypsèle et les rives de l'Hèbre,
    Cherche le vieil Hyllos et dis-lui qu'il célèbre
    Un long deuil pour le fils qu'il ne reverra pas.

    Ma chair assassinée a servi de repas
    Aux loups. Le reste gît en ce hallier...