Une résurrection

Autrefois, un pauvre arbre, au coin d'une prairie,
M'avait toujours frappé les yeux
Par son dénudé soucieux
Et par l'air écrasé de sa sommeillerie.

Or, après bien des ans, ce soir, je le retrouve.
Et, c'est un ébahissement
Tout mêlé d'attendrissement.
Comme un trouble ravi qu'à son aspect j'éprouve.

Car, maintenant, pour l'oeil, le serpent de la sève
Qui tette les rameaux, les étouffe et s'y tord,
Le gui, lui rend la vie en aggravant sa mort !

Et l'arbre repommé, débrouillassé d'ennuis,
Gaillardement vert jaune, orgueilleux se relève,
Semblant tout revêtu d'un feuillage de buis.

Collection: 
1875

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La ruelle sinistre est mon seul habitacle ;
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Brusque, avec un frisson
De frayeur et de fièvre,
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Ni mouche ni pinson ;
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La chanson
Sur la lèvre.

Tremblant au moindre accroc,
La barbe hérissée
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L'échelle, aux tons de parchemin,
Pourrit au bas de la muraille.

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