Autour des corps, qu'une mort avancée

Autour des corps, qu'une mort avancée
Par violance a privez d'un beau jour,
Les ombres vont, et font maint et maint tour,
Aimans encor leur dépoüille laissée.

Au lieu cruel, où j'eu l'ame blessée
Et fu meurtri par les flèches d'Amour,
J'erre, je tourne et retourne à l'entour,
Ombre maudite, errante et dechassée.

Legers esprits, plus que moy fortunez,
Comme il vous plaist vous allez et venez
Au lieu qui clost vostre depouille aimée.

Vous la voyez, vous la pouvez toucher,
Où, las ! je crains seulement d'approcher
L'endroit qui tient ma richesse enfermée.

Collection: 
1576

More from Poet

  • L'âpre fureur de mon mal véhément
    Si hors de moi m'étrange et me retire
    Que je ne sais si c'est moi qui soupire,
    Ni sous quel ciel m'a jeté mon tourment.

    Suis-je mort ? Non, j'ai trop de sentiment,
    Je suis trop vif et passible au martyre.
    Suis-je vivant ? Las...

  • Si la vierge Erigone, Andromède, et Cythère,
    Astres pleins d'amitié, bénins et gracieux,
    Font le ciel plus aimable, et l'embellissent mieux
    Que le noir Scorpion, l'Hydre et le Sagittaire,

    Pourquoi ne changez-vous ce courage adversaire ?
    Pourquoi ne sont plus doux...

  • Celui que l'Amour range à son commandement
    Change de jour en jour de façon différente.
    Hélas ! j'en ai bien fait mainte preuve apparente,
    Ayant été par lui changé diversement.

    Je me suis vu muer, pour le commencement,
    En cerf qui porte au flanc une flèche sanglante...

  • Que servirait nier chose si reconnue ?
    Je l'avoue, il est vrai, mon amour diminue,
    Non pour objet nouveau qui me donne la loi,
    Mais c'est que vos façons sont trop froides pour moi.
    Vous avez trop d'égard, de conseil de sagesse,
    Mon humeur n'est pas propre à si tiède...

  • Si la loi des amours saintement nous assemble,
    Avec un seul esprit nous faisant respirer,
    L'outrage du malheur se peut-il endurer,
    Qui si cruellement nous arrache d'ensemble ?

    Je ne vous vois jamais, mon coeur, que je ne tremble,
    Appréhendant l'effort qui nous doit...