Hèraklès au taureau

Le soleil déclinait vers l'écume des flots,
Et les grasses brebis revenaient aux enclos ;
Et les vaches suivaient, semblables aux nuées
Qui roulent sans relâche, à la file entraînées,
Lorsque le vent d'automne, au travers du ciel noir,
Les chasse à grands coups d'aile, et qu'elles vont pleuvoir.
Derrière les brebis, toutes lourdes de laine,
Telles s'amoncelaient les vaches dans la plaine.
La campagne n'était qu'un seul mugissement,
Et les grands chiens d'Elis aboyaient bruyamment.
Puis, succédaient trois cents taureaux aux larges cuisses,
Puis deux cents au poil rouge, inquiets des génisses,
Puis douze, les plus beaux et parfaitement blancs,
Qui de leurs fouets velus rafraîchissaient leurs flancs,
Hauts de taille, vêtus de force et de courage,
Et paissant d'habitude au meilleur pâturage.
Plus noble encor, plus fier, plus brave, plus grand qu'eux,
En avant, isolé comme un chef belliqueux,
Phaétôn les guidait, lui, l'orgueil de l'étable,
Que les anciens bouviers disaient à Zeus semblable,
Quand le Dieu triomphant, ceint d'écume et de fleurs,
Nageait dans la mer glauque avec Europe en pleurs.
Or, dardant ses yeux prompts sur la peau léonine
Dont Hèraklès couvrait son épaule divine,
Irritable, il voulut heurter d'un brusque choc
Contre cet étranger son front dur comme un roc ;
Mais, ferme sur Ses pieds, tel qu'une antique borne,
Le héros d'une main le saisit par la corne,
Et, sans rompre d'un pas, il lui ploya le col,
Meurtrissant ses naseaux furieux dans le sol.
Et les bergers en foule, autour du fils d'Alkmène,
Stupéfaits, admiraient sa vigueur surhumaine,
Tandis que, blancs dompteurs de ce soudain péril,
De grands muscles roidis gonflaient son bras viril.

Collection: 
1856

More from Poet

  • (Études latines, X)

    Offre un encens modeste aux Lares familiers,
    Phidylé, fruits récents, bandelettes fleuries ;
    Et tu verras ployer tes riches espaliers
    Sous le faix des grappes mûries.

    Laisse, aux pentes d'Algide, au vert pays Albain,
    La brebis, qui promet...

  • La lune sous la nue errait en mornes flammes,
    Et la tour de Komor, du Jarle de Kemper,
    Droite et ferme, montait dans l'écume des lames.

    Sous le fouet redoublé des rafales d'hiver
    La tour du vieux Komor dressait sa masse haute,
    Telle qu'un cormoran qui regarde la...

  • Tandis qu'enveloppé des ténèbres premières,
    Brahma cherchait en soi l'origine et la fin,
    La Mâyâ le couvrit de son réseau divin,
    Et son coeur sombre et froid se fondit en lumières.

    Aux pics du Kaîlaça, d'où l'eau vive et le miel
    Filtrent des verts figuiers et des...

  • Je pâlis et tombe en langueur :
    Deux beaux yeux m'ont blessé le coeur.

    Rose pourprée et tout humide,
    Ce n'était pas sa lèvre en feu ;
    C'étaient ses yeux d'un si beau bleu
    Sous l'or de sa tresse fluide.

    Je pâlis et tombe en langueur :
    Deux beaux yeux m'...

  • Sur la montagne aux sombres gorges
    Où nul vivant ne pénétra,
    Dans les antres de Lipara
    Hèphaistos allume ses forges.

    Il lève, l'illustre Ouvrier,
    Ses bras dans la rouge fumée,
    Et bat sur l'enclume enflammée
    Le fer souple et le dur acier.

    Les...