Si j'aime cil, que je devrais haïr

Si j'aime cil, que je devrais haïr,
Et hais celui, que je devrais aimer,
L'on ne s'en doit autrement ebahir,
Et ne m'en dût aucun en rien blâmer.

Car de celui le bien dois estimer,
Et si me fuit, comme sa non semblable :
Mais de celui-ci le plaisir trop damnable
M'ôte le droit par la Loi maintenu.

Voilà pourquoi je me sens redevable,
A celui-là, qui m'est le moins tenu.

(Rymes XXXV)

Collection: 
1533

More from Poet

  • Par ce dizain clairement je m'accuse
    De ne savoir tes vertus honorer,
    Fors du vouloir, qui est bien maigre excuse :
    Mais qui pourrait par écrit décorer
    Ce qui de soi se peut faire adorer ?

    Je ne dis pas, si j'avais ton pouvoir,
    Qu'à m'acquitter ne fisse mon...

  • Prenez le cas que, comme je suis vôtre -
    Et être veux - vous soyez tout à moi :
    Certainement par ce commun bien nôtre
    Vous me devriez tel droit que je vous dois.

    Et si Amour voulait rompre sa Loi,
    Il ne pourrait l'un de nous dispenser,
    S'il ne voulait...

  • Heureuse est la peine
    De qui le plaisir
    À sur foi certaine
    Assis son désir.
    L'on peut assez en servant requérir,
    Sans toutefois par souffrir acquérir
    Ce que l'on pourchasse
    Par trop désirer,
    Dont en male grâce
    Se faut retirer.

    Car un...

  • Qui voudra bien contempler l'Univers,
    Où du grand Dieu le grand pouvoir abonde
    En éléments, et animaux divers,
    En Ciel, et Terre, et Mer large et profonde,
    Vienne voir l'homme, où la machine ronde
    Est toute enclose, et plus, qui bien le prend.
    Car pour soi...

  • Soit que par égale puissance
    L'affection, et le désir
    Débattent de la jouissance
    Du bien, dont se veulent saisir :

    Si vous voulez leur droit choisir,
    Vous trouverez sans fiction,
    Que le désir en tout plaisir
    Suivra toujours l'affection.

    (Rymes...