Un vulgaire assassin va chercher les ténèbres ;
Il nie, il jure sur l’autel ;
Mais nous, grands, libres, fiers, à nos exploits funèbres,
A nos turpitudes célèbres,
Nous voulons attacher un éclat immortel.
De l’oubli taciturne et de son onde noire
Nous savons détourner le cours.
Nous appelons sur nous l’éternelle mémoire;
Nos forfaits, notre unique histoire,
Parent de nos cités les brillants carrefours.
O gardes de Louis, sous les voûtes royales
Par nos ménades déchirés,
Vos têtes sur un fer ont, pour nos bacchanales,
Orné nos portes triomphales
Et ces bronzes hideux, nos monumens sacrés.
Tout ce peuple hébété que nul remords ne touche,
Cruel, même dans son repos,
Vient sourire aux succès de sa rage farouche,
Et, la soif encore à la bouche,
Ruminer tout le sang dont il a bu les flots.
Arts dignes de nos yeux ! pompe et magnificence
Dignes de notre liberté,
Dignes des vils tyrans qui dévorent la France,
Dignes de l’atroce démence
Du stupide David qu’autrefois j’ai chanté.
De Barca, du Niger les désertes arènes
Nourrissent cérastes ardents,
Tigres à l’oeil de flamme, implacables hyènes.
Le bitume flotte en leur veines ;
Une rage homicide aiguillonne leurs dents.
A de tels compagnons votre juste message
Devait ouvrir votre cité,
Se jeter sur le faible est aussi leur courage.
Ils vivent aussi de carnage ;
Voir du sang est aussi leur seule volupté.
Mais n’osez plus flétrir de votre ignare estime
Des mortels semblables aux dieux.
Dans leurs mâles écrits quel foudre magnanime
Tonne sur vous et sur le crime!
Ah ! si le crime et vous pouviez baisser les yeux !...