Le Premier Chagrin de l’enfance

Oh ! rappelez, mon frère, et qu’il vienne à ma voix,
             Comme il venait naguère :
Je ne puis jouer seul, sans l’ami de mon choix,
          Où donc est-il allé, mon frère ?

L’été nous rend enfin ses abeilles, ses fleurs ;
             Le papillon volage
Aux rayons du soleil étale ses couleurs,
          Mais de le chasser n’ai courage.

Dans le jardin nos fleurs s’inclinent de sommeil,
             Lentement vers la terre ;
Notre vigne affaissée est brûlée au soleil,
          Oh ! rappelez-le donc, mon frère ! ”

— “ Il ne peut plus t’entendre, hélas ! mon cher enfant,
             Celui qui fut ton frère,
Tu ne le verras plus ce visage charmant,
          Tu ne le verras plus sur terre.

“ Existence de rose, il n’a vécu qu’un jour,
             Un jour… hors de ses langes :
Et pour jouer, enfant n’attend pas son retour,
          Car ton frère est avec les anges. ”

— “ Comment ! il a quitté ses fleurs, son bel oiseau,
             Et son gentil parterre ?
Et quand je lui dirai viens jouer au cerceau,
          Il ne reviendra pas, mon frère ?

“ Et nous n’irons donc plus, heureux autant qu’un Roi,
             Jouer dans le bocage ;
Oh ! tandis que mon frère était là… près de moi,
          Que ne l’ai-je aimé davantage ? ”

Collection: 
1813

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