Le Médaillon d’Iseult

 
Bronze charmant donnant d’amour la fièvre,
Verte émeraude où luit une beauté,
Un ange, Iseult, au regard attristé ;
Oh ! laissez-moi vous presser sur ma lèvre,
Laissez-moi cette volupté !

Volupté chaste, et la seule où j’aspire ;
Car de mon doigt je n’oserais toucher
Si belle"enfant, peur de l’effaroucher ;
Je la contemple, ivre de son empire,
Comme un pèlerin un clocher.

Tant sa beauté sur mon âme est puissante,
Tant à son air mon cœur est épuré,

Tant pour ma bouche elle est vase sacré,
Tant je révère une fleur languissante
Qui penche à son matin doré.

Jamais pistil n’eut plus belle corolle ! —
Livre ton âme a la sécurité ;
Pour le tombeau laisse ta piété ;
Console-toi, toi, dont l’aspect console,
Assez longue est l’éternité.

Reste avec nous ! que ton exil s’achève
Sombre, mais pur, ange au ciel attendu !
Va, dans la foule, un ami t’est rendu,
Il te comprend, raconte-lui ton rêve ;
Qu’il guide ton pas éperdu.

Plus avec toi de solitude fade,
Portrait divin ! car un portrait aimé,
C’est une amie au langage embaumé,
C’est pour mon cœur suave sérénade
Que berce un vent tout parfumé.

Qui t’a parfait ? bijou, bronze fragile,
Et ce bonheur, qui me l’a fait ?… — c’est Jehan !
Ce bon ami, dont l’ébauchoir agile
Sait éveiller Abélard du l’argile,
Hugo, Calvin, Esmeralda, Roland,
En dépit d’Homère et Virgile.

Collection: 
1829

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