Guitare

 
La douce Isabelle d’Espagne
Songeait dans son appartement,
Patrocinio, sa compagne,
Priait le ciel dévotement,

Quand on vint lui dire : « L’empire
De votre ami Napoléon,
À l’heure où nous parlons, expire,
Reine de Castille et Léon. »

Puis on lui conta la déroute
De Sedan, cette lâcheté
De l’homme qui fit banqueroute
À l’honneur, à la dignité ;

Comment, pour sauver ses charrettes,
Son or, ses bagages errants,
Ce beau fumeur de cigarettes
S’était écrié : « Je me rends ! »

Ce n’est pas un cœur de romaine
Acceptant les coups les plus lourds,
Certes, qu’Isabelle promène
Sous un corsage de velours,

Mais si peu que soit une femme,
Elle peut encore juger
Avec mépris l’amant infâme
De Marguerite Bellanger.

Aussi, l’innocente Isabelle,
Devant son époux ahuri,
Se dressa fière, presque belle,
Et se tournant vers Marfori :

« Par saint Jacques de Compostelle !
Ton âme à tous se décela,
On connaît ta valeur, dit-elle,
Mais tu n’aurais pas fait cela ! »

7 octobre

Collection: 
1859

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