Si nous nous admirons vraiment les uns les autres,
Du fond même de notre ardeur et notre foi,
Vous les penseurs, vous les savants, vous les apôtres,
Pour les temps qui viendront, vous extrairez la loi.
Nous apportons, ivres du monde et de nous-mêmes,
Des cœurs d’hommes nouveaux dans le vieil univers.
Les Dieux sont loin et leur louange et leur blasphème ;
Notre force est en nous et nous avons souffert.
Nous admirons nos mains, nos yeux et nos pensées,
Même notre douleur qui devient notre orgueil ;
Toute recherche est fermement organisée
Pour fouiller l’inconnu dont nous cassons le seuil.
S’il est encor là-bas des caves de mystère
Où tout flambeau s’éteint ou recule effaré,
Plutôt que d’en peupler les coins par des chimères
Nous préférons ne point savoir que nous leurrer.
Un infini plus sain nous cerne et nous pénètre ;
Notre raison monte plus haut ; notre cœur bout ;
Et nous nous exaltons si bellement des êtres
Que nous changeons le sens que nous avons de tout.
Cerveau, tu règnes seul sur nos actes lucides ;
Aimer, c’est s’asservir ; admirer, se grandir ;
Ô tel profond vitrail, dans l’ombre des absides,
Qui reflète la vie et la fait resplendir !
Aubes, matins, midis et soirs, toute lumière
Est aussitôt muée en or et en beauté.
Il exalte l’espace et le ciel et la terre
Et transforme le monde à travers sa clarté.