La Comète

Voici la comète ! Elle accourt
Du fond des immensités bleues ;
Elle n’est plus guère, à ce jour,
Qu’à quelques milliards de lieues !

Un rien qui sera tôt bouffé.
Qu’est cela pour elle ? C’est comme
Pour Bibi changer de café.
Donc bientôt, de Paris à Rome,

On la verra faire le paon.
Et déjà plus d’un se demande
Si le sort du monde en dépend ;
Or, dans le doute, il appréhende.

Serons-nous donc carbonisés,
Au contact de cette comète,
Consumés, volatilisés,
Ni plus ni moins qu’une allumette ?…

On en voit qui, mourant d’effroi,
Ne vivent plus que dans leurs caves.
Après tout, c’est un bon endroit,
Qui plaît aussi bien aux plus braves.

J’en sais qui font leur testament.
Voilà que je comprends moins, puisque,
S’il arrive un chambardement,
Nous courons tous le même risque.

À quoi bon se mettre en souci ?
Si notre misérable monde
Doit disparaître ces jours-ci,
Ce sera fait dans la seconde.

J’aime mieux périr par le feu,
D’ailleurs, que par l’eau. Sale affaire,
Qu’un déluge ! Songez un peu
Que d’eau ça mettrait dans mon verre !

Enfin, je suis tout résigné.
Pourvu que j’aie, en quelque sorte,
Le temps de prendre le « dernier » …
Cette comète ne m’importe.

Mieux que ça, loin de m’inspirer
Une terreur moyenâgeuse,
Je dis qu’il faut bien augurer
De cette belle voyageuse.

Vous verrez comme elle sera
Bénigne entre les plus bénignes ;
Et comme elle influencera
De la bonne façon nos vignes !

Collection: 
1920

More from Poet

  • Je demande en mariage
    La fille d’un roi,
    Avec ou sans alliage :
    Plutôt sans, ma foi.

    ...
  • Quand, en Chine, un Chinois devient décapité,
    Une fois sa besogne faite,
    Le bourreau, sans tarder, avec habileté
    Lui recoud, aussitôt, la tête.

    La...

  •  
    Dès qu’il sut que la Joconde,
    La merveille sans seconde (?)
    Du Louvre avait disparu,
    Lépine, avec sa cohorte
    De sbires de toute sorte,
    Aussitôt est accouru,

    Suivi de Monsieur Homolle,
    Œil inerte et jambe molle,
    Et de Dujardin-Beaumetz,...

  • Vous avez beau dire et faire
    Voici le Printemps !
    Vous pouvez dans l’atmosphère
    Mordre à pleines dents....

  • Je t’ai maudite bien des fois,
    Eau du ciel, en mon ignorance ;
    N’ayant guère de déférence
    Sinon pour le vin que je bois.

    Ce soleil qui nous tyrannise,
    Certes, fera du vin coté ;
    Mais plus nombreux il eût été,
    S’il eût plus plu, qu’on se le dise.

    ...