A M. V. H.

Sonnet

Il faut, dans ce bas monde, aimer beaucoup de choses,
Pour savoir, après tout, ce qu'on aime le mieux,
Les bonbons, l'Océan, le jeu, l'azur des cieux,
Les femmes, les chevaux, les lauriers et les roses.

Il faut fouler aux pieds des fleurs à peine écloses ;
Il faut beaucoup pleurer, dire beaucoup d'adieux.
Puis le coeur s'aperçoit qu'il est devenu vieux,
Et l'effet qui s'en va nous découvre les causes.

De ces biens passagers que l'on goûte à demi,
Le meilleur qui nous reste est un ancien ami.
On se brouille, on se fuit. Qu'un hasard nous rassemble,

On s'approche, on sourit, la main touche la main,
Et nous nous souvenons que nous marchions ensemble,
Que l'âme est immortelle, et qu'hier c'est demain.

Collection: 
1834

More from Poet

  • Sonnet

    Ainsi, quand la fleur printanière
    Dans les bois va s'épanouir,
    Au premier souffle du zéphyr
    Elle sourit avec mystère ;

    Et sa tige fraîche et légère,
    Sentant son calice s'ouvrir,
    Jusque dans le sein de la terre
    Frémit de joie et de désir....

  • Oui, si j'étais femme, aimable et jolie,
    Je voudrais, Julie,
    Faire comme vous ;
    Sans peur ni pitié, sans choix ni mystère,
    A toute la terre
    Faire les yeux doux.

    Je voudrais n'avoir de soucis au monde
    Que ma taille ronde,
    Mes chiffons chéris,...

  • Vous m'envoyez, belle Emilie,
    Un poulet bien emmailloté ;
    Votre main discrète et polie
    L'a soigneusement cacheté.
    Mais l'aumône est un peu légère,
    Et malgré sa dextérité,
    Cette main est bien ménagère
    Dans ses actes de charité.
    C'est regarder à la...

  • Non, quand bien même une amère souffrance
    Dans ce coeur mort pourrait se ranimer ;
    Non, quand bien même une fleur d'espérance
    Sur mon chemin pourrait encor germer ;

    Quand la pudeur, la grâce et l'innocence
    Viendraient en toi me plaindre et me charmer,
    Non,...

  • Que j'aime le premier frisson d'hiver ! le chaume,
    Sous le pied du chasseur, refusant de ployer !
    Quand vient la pie aux champs que le foin vert embaume,
    Au fond du vieux château s'éveille le foyer ;

    C'est le temps de la ville. - Oh ! lorsque l'an dernier,
    J'y...