Contre l’écroulement sa ruine se cabre.
Il se dresse au-dessus des rocs, des sauvageons,
Lugubre, noir, vert fauve, et couleur fleur d’ajoncs,
Vengé par son orgueil du Temps qui le délabre.
Autour, dort un étang dont le reptile glabre
Fend parfois le croupi de son brusque plongeon ;
Seuls, faucheux, rats, hiboux, moisissure en bourgeons,
Habitent son dedans crasseux comme saint Labre ;
Sauf une chambre, tout est vide en ce donjon.
Mais, entre ces hauts murs, d’un rouge de cinabre,
Où le massacre, il semble, a mis son badigeon,
En face d’un portrait dont le regard vous sabre,
Au vent coulis pleureur bougeant comme des joncs,
Hideuses, pendent là trois robes blanc macabre,
Côte à côte, aux bras d’un monstrueux candélabre.
« Un jour, me dit un vieux braconnier de banlieue,
Par un temps où, des fois, la nue ardente et bleue
Goutt’lait sus les feuill’ cuit’ avec de lourds tac tac,
Je m’trouvai d’vant c’donjon qui fermait un cul d’sac.
J’entrai l’voir aux cris gais d’l’hirondelle et d’l’hoch’ queue
Qui, d’pierraill’ en roseaux, volaient sus l’rond du lac ;
Mais, quoiq’ ça fut l’plein jour, et q’mon fidèl’ chien Black,
Près d’moi, tournât, virât, en frétillant d’la queue,
Quand j’vis ceux trois r’venants pendus, j’eus un tel trac
Que j’me crus égaré loin… loin… à plus d’cent lieues,
Enfermé dans la tour d’un château d’Barbe-bleue ! »