Idylles héroïques - Frantz - Épilogue

 

HYMNE À LA TERRE

Tu permets au travail de presser ta mamelle,
Patiente nourrice, et, depuis six mille ans,
Tu gardes à tes fils ta richesse éternelle,
Tu livres sans compter les trésors de tes flancs.

Tes bois nous sont ouverts, ta plus belle parure !
Nous fouillons dans tes os de marbre et de métal.
Aux besoins du réel tu donnes sans mesure...
Mais tu portes aussi ta moisson d’idéal !

Tes saisons pour notre âme ont d’indicibles charmes,
Je les admire en toi..., mais ils viennent d’ailleurs !
S’ils font naître si bien le sourire ou les larmes,
C’est qu’ils ouvrent nos yeux à des mondes meilleurs.

Sois soumise au travail, ô terre, et sois bénie !
Donne à flots tes épis au pain de tous les jours ;
Mais conserve tes bois, sources de l’harmonie,
Et garde aussi tes fleurs, dont vivent les amours.

Par les vertus des morts qu’à tes champs nous donnâmes,
Fais croître la beauté, la sagesse en tout lieu ;
Tu dois nourrir les fruits et les fleurs pour les âmes,
             Et les âmes pour Dieu.

Collection: 
1832

More from Poet

  • Pourquoi, vous qui rêvez d'unions éternelles,
    Maudissez-vous la mort ?
    Est-ce bien moi qui romps des âmes fraternelles
    L'indissoluble accord ?

    N'est-ce donc pas la vie aux querelles jalouses,
    Aux caprices moqueurs,
    Qui vient, comme la feuille à travers ces...

  • Voix des torrents, des mers, dominant toute voix,
    Pins au large murmure.
    Vous ne dites pas tout, grandes eaux et grands bois,
    Ce que sent la nature.

    Vous n'exhalez pas seuls, ô vastes instruments,
    Ses accords gais ou mornes ;
    Vous ne faites pas seuls, en vos...

  • Déjà mille boutons rougissants et gonflés,
    Et mille fleurs d'ivoire,
    Forment de longs rubans et des noeuds étoilés
    Sur votre écorce noire,

    Jeune branche ! et pourtant sous son linceul neigeux,
    Dans la brume incolore,
    Entre l'azur du ciel et nos sillons...

  • I

    Quand l'homme te frappa de sa lâche cognée,
    Ô roi qu'hier le mont portait avec orgueil,
    Mon âme, au premier coup, retentit indignée,
    Et dans la forêt sainte il se fit un grand deuil.

    Un murmure éclata sous ses ombres paisibles ;
    J'entendis des sanglots et...

  • Choeur des Alpes

    Vois ces vierges, là-haut, plus blanches que les cygnes,
    Assises dans l'azur sur les gradins des cieux !
    Viens ! nous invitons l'âme à des fêtes insignes,
    Nous, les Alpes, veillant entre l'homme et les dieux.

    Des amants indiscrets l'abîme nous...