À Madame ***

 
« I love not man the less but nature more ! »
(BYRON.)

Oh ! non, vous vous trompez, la solitude est sainte !
Votre fils est heureux sous l’arbre de l’enceinte,
Quand il entend le chant de nos rouges moqueurs,
Harmonie enivrante et faite pour nos cœurs,
Oh ! ne répétez point ces amères paroles :
Vous ne connaissez point nos savanes créoles.
Si votre enfant aimé vit comme Robinson,
Oh ! c’est qu’il est poëte et que son cœur est bon,
Oh ! c’est qu’il a compris que là, la vie est douce,
C’est qu’un instinct puissant vers la forêt nous pousse,
Que nous avons besoin, nous poëtes jumeaux,
De la voix des grands pins pour endormir nos maux
Lorsque nous savourons, sur la natte créole,
Le far niente de Naple et la sieste espagnole,
Que nous avons besoin tous deux, comme René,
D’y reposer un cœur du ciel abandonné,
D’y confier la nuit nos secrets aux vieux chênes,
D’y vivre et mourir loin des affaires humaines !

Nouvelle-Orléans, janvier 1837.

Collection: 
1830

More from Poet

 
Though the strained mast should quiver as a reed,
And the rent canvass fluttering strew the gale,
Still must I on…
(BYRON.)

Oui, le Vaillant a bien accompli son voyage !
Il a franchi le golfe en cinq jours de sillage.
Le ...

 
Je le sens, pour une âme tendre,
Un amour malheureux est encore un bonheur.
(DESBORDES VALMORE.)

La vierge, ange des cieux, qui dorait notre vie,
Dans un jour de malheur peut nous être ravie :
Mais ce qui ne fuit pas, mais l’éternel trésor...

 
Is there a man of soul so dead,
Who never to himself hath said :
This is my own, my native land !
(W. SCOTT)

Adieu, frère créole, ami d’enfance, adieu !...
Vogue sur l’Océan, à la merci de Dieu !
Comme un coursier sans frein qui jette...

 
Le soir ramène le silence.
………………………
Je suis, dans le vague des airs,
Le char de la nuit qui s’avance.
(LAMARTINE.)

La lune du Lacombe argente les deux rives :
Pas un bruit de roseaux ni de feuilles plaintives.
Au camp...

 
O Dieu ! si tu m’avais donné une femme selon mes désirs ;
si, comme à notre premier père, tu m’eusses amené par la
main une Ève tirée de moi-même !
(CHATEAUBRIAND.)

Je me disais : La vie est triste et monotone !
Et quoi ! toujours, toujours...