HORACE
Lorsque je t’avais pour amie,
Quand nul jeune garçon, plus robuste que moi,
N’entourait de ses bras ton épaule arrondie,
Auprès de toi, blanche Lydie,
J’ai vécu plus joyeux et plus heureux qu’un roi.
LYDIE
Quand pour toi j’étais la plus chère
Quand Chloé pâlissait auprès de Lydia,
Lydia, qu’on vantait dans l’Italie entière,
Vécut plus heureuse et plus fière
Que dans les bras d’un dieu la Romaine Ilia.
HORACE
Chloé me gouverne à présent,
Chloé, savante au luth, habile en l’art du chant ;
Le doux son de sa voix de volupté m’enivre.
Je suis prêt à cesser de vivre
Si, pour la préserver, les dieux voulaient mon sang.
LYDIE
Je me consume maintenant
D’une amoureuse ardeur que rien ne peut éteindre,
Pour le fils d’Ornithus, ce bel adolescent.
Je mourrais deux fois sans me plaindre
Si, pour le préserver, les dieux voulaient mon sang.
HORACE
Eh quoi ! si dans notre pensée
L’ancien amour se rallumait ?
Si la blonde Chloé de ma maison chassée,
Ma porte se rouvrait ? si Vénus offensée
Au joug d’airain nous ramenait ?
LYDIE
Calaïs, ma richesse unique,
Est plus beau qu’un soleil levant,
Et toi plus léger que le vent,
Plus prompt à t’irriter que l’âpre Adriatique ;
Cependant près de toi, si c’était ton plaisir,
Volontiers j’irais vivre, et volontiers mourir.