Triolets fantaisistes

 
Sidonie a plus d’un amant,
C’est une chose bien connue
Qu’elle avoue, elle, fièrement.
Sidonie a plus d’un amant
Parce que, pour elle, être nue
Est son plus charmant vêtement.
C’est une chose bien connue,
Sidonie a plus d’un amant.

Elle en prend à ses cheveux blonds
Comme, à sa toile, l’araignée
Prend les mouches et les frelons.
Elle en prend à ses cheveux blonds.

Vers sa prunelle ensoleillée
Ils volent, pauvres papillons.
Comme, à sa toile, l’araignée
Elle en prend à ses cheveux blonds.

Elle en attrape avec les dents
Quand le rire entrouvre sa bouche
Et dévore les imprudents.
Elle en attrape avec les dents.
Sa bouche, quand elle se couche,
Reste rose et ses dents dedans.
Quand le rire entrouvre sa bouche
Elle en attrape avec les dents.

Elle les mène par le nez,
Comme fait, dit-on, le crotale
Des oiseaux qu’il a fascinés.
Elle les mène par le nez.
Quand dans une moue elle étale
Sa langue à leurs yeux étonnés,
Comme fait, dit-on, le crotale
Elle les mène par le nez.

Sidonie a plus d’un amant,
Qu’on le lui reproche ou l’en loue
Elle s’en moque également.
Sidonie a plus d’un amant.

Aussi, jusqu’à ce qu’on la cloue
Au sapin de l’enterrement,
Qu’on le lui reproche ou l’en loue,
Sidoine aura plus d’un amant.

Collection: 
1862

More from Poet

  • J'ai trois fenêtres à ma chambre :
    L'amour, la mer, la mort,
    Sang vif, vert calme, violet.

    Ô femme, doux et lourd trésor !

    Froids vitraux, odeurs d'ambre.
    La mer, la mort, l'amour,
    Ne sentir que ce qui me plaît...

    Femme, plus claire que le jour !...

  • Aux arbres il faut un ciel clair,
    L'espace, le soleil et l'air,
    L'eau dont leur feuillage se mouille.
    Il faut le calme en la forêt,
    La nuit, le vent tiède et discret
    Au rossignol, pour qu'il gazouille.

    Il te faut, dans les soirs joyeux,
    Le triomphe ; il...

  • J'ai rêvé les amours divins,
    L'ivresse des bras et des vins,
    L'or, l'argent, les royaumes vains,

    Moi, dix-huit ans, Elle, seize ans.
    Parmi les sentiers amusants
    Nous irons sur nos alezans.

    Il est loin le temps des aveux
    Naïfs, des téméraires voeux!...

  • Quant nous irisons
    Tous nos horizons
    D'émeraudes et de cuivre,
    Les gens bien assis
    Exempts de soucis
    Ne doivent pas nous poursuivre.

    On devient très fin,
    Mais on meurt de faim,
    A jouer de la guitare,
    On n'est emporté,
    L'hiver ni l'été...

  • Le rhythme argentin de ta voix
    Dans mes rêves gazouille et tinte.
    Chant d'oiseau, bruit de source au bois,
    Qui réveillent ma joie éteinte.

    Mais les bois n'ont pas de frissons,
    Ni les harpes éoliennes.
    Qui soient si doux que tes chansons,
    Que tes...