Six tercets

 

À Degas.

Les cheveux plantureux et blonds, bourrés de crin,
Se redressent altiers : deux touffes latérales
Se collent sur le front en moqueuses spirales.

Aigues-marines, dans le transparent écrin
Des paupières, les yeux qu’un clair fluide baigne
Ont un voluptueux regard qui me dédaigne.

Tout me nargue : les fins sourcils, arcs indomptés,
Le nez au flair savant, la langue purpurine
Qui s’allonge jusqu’à chatouiller la narine,

Et le menton pointu, signe des volontés
Implacables, et puis cette irritante mouche
Sise au-dessous du nez et tout près de la bouche.

Mais, au bout du menton rose où vient se poser
Un doigt mignon, dans cette attitude songeuse,
Énigmatiquement la fossette se creuse.

Je prends, à la faveur de ce calme, un baiser
Sur les flocons dont la nuque fine est couverte,
En prix de ce croquis rimé d’après vous, Berthe.

Collection: 
1862

More from Poet

  • J'ai trois fenêtres à ma chambre :
    L'amour, la mer, la mort,
    Sang vif, vert calme, violet.

    Ô femme, doux et lourd trésor !

    Froids vitraux, odeurs d'ambre.
    La mer, la mort, l'amour,
    Ne sentir que ce qui me plaît...

    Femme, plus claire que le jour !...

  • Aux arbres il faut un ciel clair,
    L'espace, le soleil et l'air,
    L'eau dont leur feuillage se mouille.
    Il faut le calme en la forêt,
    La nuit, le vent tiède et discret
    Au rossignol, pour qu'il gazouille.

    Il te faut, dans les soirs joyeux,
    Le triomphe ; il...

  • J'ai rêvé les amours divins,
    L'ivresse des bras et des vins,
    L'or, l'argent, les royaumes vains,

    Moi, dix-huit ans, Elle, seize ans.
    Parmi les sentiers amusants
    Nous irons sur nos alezans.

    Il est loin le temps des aveux
    Naïfs, des téméraires voeux!...

  • Quant nous irisons
    Tous nos horizons
    D'émeraudes et de cuivre,
    Les gens bien assis
    Exempts de soucis
    Ne doivent pas nous poursuivre.

    On devient très fin,
    Mais on meurt de faim,
    A jouer de la guitare,
    On n'est emporté,
    L'hiver ni l'été...

  • Le rhythme argentin de ta voix
    Dans mes rêves gazouille et tinte.
    Chant d'oiseau, bruit de source au bois,
    Qui réveillent ma joie éteinte.

    Mais les bois n'ont pas de frissons,
    Ni les harpes éoliennes.
    Qui soient si doux que tes chansons,
    Que tes...