• Quand j'approche de vous, et que je prends l'audace
    De regarder vos yeux, rois de ma liberté,
    Une ardeur me saisit, je suis tout agité,
    Et mille feux ardents en mon coeur prennent place.

    Hélas ! pour mon salut que faut-il que je fasse,
    Sinon vous éloigner contre ma volonté ?
    Je le fais ; toutefois, je n'en suis mieux traité,
    Car, si j'étais en feu...

  • Blessé d'une plaie inhumaine,
    Loin de tout espoir de secours,
    Je m'avance à ma mort prochaine,
    Plus chargé d'ennuis que de jours.

    Celle qui me brûle en sa glace,
    Mon doux fiel, mon mal et mon bien,
    Voyant ma mort peinte en ma face,
    Feint hélas ! n'y connaître rien.

    Comme un roc à l'onde marine
    Elle est dure aux flots de mes pleurs...

  • Marchands, qui recherchez tout le rivage more
    Du froid Septentrion et qui, sans reposer,
    À cent mille dangers vous allez exposer
    Pour un gain incertain, qui vos esprits dévore,

    Venez seulement voir la beauté que j'adore,
    Et par quelle richesse elle a su m'attiser :
    Et je suis sûr qu'après, vous ne pourrez priser
    Le plus rare trésor dont l'Afrique se...

  • Epouvantable Nuit, qui tes cheveux noircis
    Couvres du voile obscur des ténèbres humides
    Et des antres sortant par tes couleurs livides,
    De ce grand Univers les beautés obscurcis.

    Las ! si tous les travaux par toi sont adoucis,
    Au ciel, en terre, en l'air, sous les marbres liquides,
    Or que dedans ton char le silence tu guides,
    Un de tes cours entiers...

  • Le tens leger s'enfuit sans m'en apercevoir,
    Quand celle à qui je suis mes angoisses console :
    Il n'est vieil, n'y boiteux, c'est un enfant qui vole,
    Au moins quand quelque bien vient mon mal deçevoir.

    À peine ai-je loisir seulement de la voir
    Et de ravir mon ame en sa douce parole,
    Que la nuict à grands pas se haste et me la volle,
    M'ostant toute...

  • Que vous m'allez tourmentant
    De m'estimer infidèle !
    Non, vous n'êtes point plus belle
    Que je suis ferme et constant.

    Pour bien voir quelle est ma foi,
    Regardez-moi dans votre âme :
    C'est comme j'en fais, Madame ;
    Dans la mienne je vous vois.

    Si vous pensez me changer,
    Ce miroir me le rapporte ;
    Voyez donc, de même sorte,
    En...

  • Vos yeux, belle Diane, ont autant de puissance
    Qu'une arquebuse à roue, et vos sourcils voûtés,
    Ce sont deux arcs turquois, qui rendent surmontés
    Les coeurs qui pensent plus faire de résistance,

    Votre front c'est le marbre, où l'archer qui m'offense
    Aiguise à mon malheur ses traits de tous côtés,
    Votre chaste estomac, le séjour des beautés,
    La prison...

  • Hélas ! si tu prens garde aux erreurs que j'ay faites,
    Je l'advouë, ô Seigneur ! mon martyre est bien doux :
    Mais, si le sang de Christ a satisfait pour nous,
    Tu decoches sur moi trop d'ardentes sagettes.

    Que me demandes-tu ? mes oeuvres imparfaites,
    Au lieu de t'adoucir, aigriront ton courroux ;
    Soy-moy donc pitoyable, ô Dieu ! père de tous,
    Car où...

  • Éloignant vos beautés, je vous laisse en ma place
    Mon coeur qui, comme moi, point ne vous laissera.
    Plus tôt d'un trait doré Vénus vous blessera,
    Plus tôt de vos rigueurs s'amollira la glace !

    Ne vous attendez pas qu'aucun malheur le chasse,
    Car, auprès de vos yeux, rien ne l'offensera,
    Vu que, même en brûlant, assez fier il sera
    Qu'autre feu que...

  • Las ! je ne verray plus ces soleils gracieux,
    Qui servoient de lumiere à mon ame egarée !
    Leur divine clairté s'est de moy retirée
    Et me laisse esperdu, dolent et soucieux.

    C'est en vain désormais, ô grand flambeau des cieux !
    Que tu sors au matin de la plaine azurée,
    Ma nuict dure tousjours, et la tresse dorée,
    Qui sert de jour au monde est obscure...