• I

    Prenez ores courage, ô craintifs, car voici
    Votre Dieu qui vient faire ici son domicile,
    Lequel vous sauvera de la puissance hostile,
    Et par lui se feront ces belles oeuvres-ci

    Les aveugles verront, les sourds oiront aussi,
    Le boiteux marchera d'un pied ferme et agile,
    La langue des muets sera prompte et facile,
    Et vous serez en paix...

  • Lève-toi promptement, m'amour, ma toute belle
    Disait Dieu à la Vierge en ses divins écrits,
    Je suis de ta beauté divinement épris,
    Hâte-toi de venir, ma douce colombelle.

    La terre reverdit et prend robe nouvelle,
    Produisant maintes fleurs de valeur et de prix ;
    Jà la pluie et l'hiver ennuyant les esprits
    Sont passés, et voici le temps qui...

  • Ne jetez plus sur nous d'injures si grands sommes,
    Hommes par trop ingrats et de coeur endurci,
    Dieu n'a-t-il pas de nous comme de vous souci ?
    N'est-il pas créateur des femmes et des hommes ?

    Je sais bien qu'entre vous il y a maints prud'hommes,
    Maintes femmes y a vertueuses aussi ;
    Et l'un et l'autre sexe il n'y a nul sans si,
    Car d'une même...

  • (extraits)

    Paisible et solitaire Nuit,
    Sans Lune et sans Étoiles,
    Renferme le Jour qui me nuit
    Dans tes plus sombres voiles ;
    Hâte tes pas, Déesse exauce-moi,
    J'aime une Brune comme toi.

    ... Ha ! voilà le jour achevé,
    Il faut que je m'apprête ;
    L'Astre de Vénus est levé
    Propice à ma requête ;
    Si bien qu'il semble en se...

  • Assis sur un fagot, une pipe à la main,
    Tristement accoudé contre une cheminée,
    Les yeux fixés vers terre, et l'âme mutinée,
    Je songe aux crautés de mon sort inhumain.

    L'espoir qui me remet du jour au lendemain,
    Essaye à gagner temps sur ma peine obstinée,
    Et me venant promettre une autre destinée,
    Me fait monter plus haut qu'un Empereur Romain.
    ...

  • (extrait)

    O ! que j'aime la solitude !
    Que ces lieux sacrés à la nuit,
    Eloignés du monde et du bruit,
    Plaisent à mon inquiétude !
    Mon Dieu! Que mes yeux sont contents
    De voir ces bois qui se trouvèrent
    A la nativité du temps,
    Et que tous les Siècles révèrent,
    Etre encore aussi beaux et verts,
    Qu'aux premiers jours de l'Univers !...

  • ... J'ai vu ses beaux cheveux blonds, charme des regards,
    Sous l'ivoire d'un peigne alentour d'elle épars,
    Représenter au vrai le Pactole en sa source,
    Qui d'un haut marbre blanc faisant naître sa course,
    Tombe à gros bouillons d'or, et loin de soi s'enfuit,
    Excepté qu'en leur chute ils ne font point de bruit.
    C'est ainsi qu'au matin l'Aurore échevelée...

  • (extrait)

    Bacchus ! qui vois notre débauche,
    Par ton saint portrait que j'ébauche
    En m'enluminant le museau
    De ce trait que je bois sans eau ;
    Par ta couronne de lierre,
    Par la splendeur de ce grand verre,
    Par ton thyrse tant redouté,
    Par ton éternelle santé,
    Par l'honneur de tes belles fêtes,
    Par tes innombrables conquêtes,
    Par les...

  • Coucher trois dans un drap, sans feu ni sans chandelle,
    Au profond de l'hiver, dans la salle aux fagots,
    Où les chats, ruminant le langage des Goths,
    Nous éclairent sans cesse en roulant la prunelle ;

    Hausser notre chevet avec une escabelle,
    Etre deux ans à jeun comme les escargots,
    Rêver en grimaçant ainsi que les magots
    Qui, bâillant au soleil, se...

  • Là, de pieds et de mains, les hommes noirs de crimes
    Des arbres les plus hauts gagnaient les vertes cimes ;
    L'effroi désespéré redoublait leurs efforts,
    Et l'on voyait pâtir leurs membres et leurs corps.
    Ici, l'un au milieu de sa vaine entreprise,
    Pour son peu de vigueur contraint à lâcher prise,
    Blême, regarde en bas, hurle, ou semble en effet
    Hurler, tout...