• Cuyp, soleil déclinant dissous, dans l'air limpide
    Qu'un vol de ramiers gris trouble comme de l'eau,
    Moiteur d'or, nimbe au front d'un boeuf ou d'un bouleau,
    Encens bleu des beaux jours fumant sur le coteau,
    Ou marais de clarté stagnant dans le ciel vide.
    Des cavaliers sont prêts, plume rose au chapeau,
    Paume au côté ; l'air vif qui fait rose leur peau,...

  • Douce fierté des coeurs, grâce noble des choses,
    Qui brillent dans les yeux, les velours et les bois ;
    Beau langage élevé du maintien et des poses
    Héréditaire orgueil des femmes et des rois !

    Tu triomphes, Van Dyck, prince des gestes calmes,
    Dans tous les êtres beaux qui vont bientôt mourir,
    Dans toute belle main qui sait encor s'ouvrir...
    Sans s'en...

  • Crépuscule grimant les arbres et les faces,
    Avec son manteau bleu, sous son masque incertain ;
    Poussière de baisers autour des bouches lasses...
    Le vague devient tendre, et le tout près, lointain.

    La mascarade, autre lointain mélancolique,
    Fait le geste d'aimer plus faux, triste et charmant.
    Caprice de poète - ou prudence d'amant,
    L'amour ayant...

  • Mon coeur sage, fuyez l'odeur des térébinthes,
    Voici que le matin frise comme un jet d'eau.
    L'air est un écran d'or où des ailes sont peintes ;
    Pourquoi partiriez-vous pour Nice ou pour Yeddo ?

    Quel besoin avez-vous de la luisante Asie
    Des monts de verre bleu qu'Hokusaï dessinait
    Quand vous sentez si fort la belle frénésie
    D'une averse dorant les...

  • A Jean Cocteau.

    Afin de me couvrir de fourrure et de moire
    Sans de ses larges yeux renverser l'encre noire
    Tel un sylphe au plafond, tel sur la neige un ski
    Jean sauta sur la table auprès de Nijinsky.
    C'était dans un salon purpurin de Larue
    Dont l'or, d'un goût douteux, jamais ne se voila.
    La barbe d'un docteur blanditieuse et drue
    Déclarait...

  • Le temps efface tout comme effacent les vagues
    Les travaux des enfants sur le sable aplani
    Nous oublierons ces mots si précis et si vagues
    Derrière qui chacun nous sentions l'infini.

    Le temps efface tout il n'éteint pas les yeux
    Qu'ils soient d'opale ou d'étoile ou d'eau claire
    Beaux comme dans le ciel ou chez un lapidaire
    Ils brûleront pour nous d...

  • L'automne est la saison dolente.

    L'âme des labours assoupis
    Berce d'une hymne somnolente
    L'enfance des futurs épis ;

    Et, triste, la mer de Bretagne
    Se prend à gémir, dans le soir.
    Par les sentiers de la montagne,
    Commence à rôder le Mois Noir.

    Et les cloches ont l'air de veuves,
    Dans les clochers silencieux...
    Nous n'irons...

  • A André Bénac

    Ce qui me charme en toi, Quimper de Cornouailles,
    C'est qu'une âme rustique imprègne ta cité,
    Que les champs sont chez eux au coeur de tes murailles
    Et que, né paysan, ton peuple l'est resté.

    Tes rivières te font un collier de sonnailles
    Et dans leurs reflets verts mirent le quai planté
    Dont tes Nausicaas, blondes du blond des...

  • A madame Adolphe Graff

    Le ciel s'éteint, tout va dormir
    Je songe à des choses passées ;
    C'est à la fois peine et plaisir.
    La veilleuse du souvenir
    S'allume au fond de mes pensées.

    J'entends des pas, j'entends des voix,
    Des pas furtifs, des voix lointaines
    C'est peine et plaisir à la fois.
    On dirait le frisson des bois
    Sur le coeur...

  • Sur un front lisse et pur, finement épinglée,
    Tu m'évoques ma mère, ô coiffe du Trégor,
    Et, dans ta conque frêle avec art ciselée,
    C'est toute la chanson de mon passé qui dort.

    Comme tu palpitais, pudique, à la veillée,
    Sur quelque nuque mince aux chastes frisons d'or !
    De ton charme, longtemps, j'eus l'âme ensorcelée
    Et, d'y songer ce soir, mon coeur...