• Dessus les bords d'une fontaine
    D'humide mousse revêtus,
    Dont l'onde à maints replis tortus
    S'allait égarant dans la plaine,
    Un berger se mirant en l'eau
    Chantait ces vers au chalumeau :
    Cessez un jour, cessez, la belle,
    Avant ma mort d'être cruelle.

    Se peut-il qu'un si grand supplice
    Que pour vous je souffre en aimant,
    Si les...

  • Sonnet

    Elle feint de m'aimer, pleine de mignardise,
    Soupirant après moi, me voyant soupirer,
    Et par de feintes pleurs témoigne d'endurer
    L'ardeur que dans mon âme elle connaît éprise.

    Le plus accort amant, lorsqu'elle se déguise,
    De ses trompeurs attraits ne se peut retirer :
    Il faut être sans coeur pour ne point désirer
    D'être si...

  • À la fin celui l'aura
    Qui dernier la servira.
    De ce coeur cent fois volage,
    Plus que le vent animé,
    Qui peut croire d'être aimé
    Ne doit pas être cru sage
    Car enfin celui l'aura
    Qui dernier la servira.

    A tous vents la girouette,
    Sur le faîte d'une tour,
    Elle aussi vers tout amour
    Tourne le coeur et la tête
    À la fin celui...

  • J'ai beau me rappeler... Joseph Delorme... non ;
    Nul écho dans mon coeur ne s'éveille à ce nom.
    Joseph !... Lisons toujours. - Ah ! jeune aiglon sauvage,
    Cygne plaintif, amour des eaux et du rivage,
    Pour souffrir et chanter, sur la terre venu,
    Tu meurs enfin... pourquoi ne t'ai-je pas connu ?
    Car je les connais tous ceux qui seront célèbres ;
    Leurs...

  • Oui, sans peine, au travers des sophismes de Claude,
    Arnauld, des novateurs tu découvres la fraude,
    Et romps de leurs erreurs les filets captieux :
    ais que sert que ta main leur dessille les yeux,
    Si toujours dans leur âme une pudeur rebelle,
    Près d'embrasser l'Eglise, au prêche les rappelle ?
    Non, ne crois pas que Claude, habile à se tromper,
    Soit insensible...

  • Air

    Voici les lieux charmants où mon âme ravie
    Passait à contempler Silvie
    Les tranquilles moments si doucement perdus.
    Que je l'aimais alors ! Que je la trouvais belle !
    Mon coeur, vous soupirez au nom de l'Infidèle :
    Avez-vous oublié que vous ne l'aimez plus ?

    C'est ici que souvent, errant dans les prairies,
    Ma main, des fleurs les plus chéries
    Lui...

  • Que tu sais bien, Racine, à l'aide d'un acteur,
    Emouvoir, étonner, ravir un spectateur !
    Jamais Iphigénie en Aulide immolée
    N'a coûté tant de pleurs à la Grèce assemblée,
    Que dans l'heureux spectacle à nos yeux étalé
    En a fait sous son nom verser la Champmeslé.
    Ne crois pas toutefois, par tes savants ouvrages,
    Entraînant tous les coeurs, gagner tous les...

  • Au pied de cet autel de structure grossière
    Gît sans pompe, enfermé dans une vile bière,
    Le plus savant mortel qui jamais ait écrit ;
    Arnauld, qui, sur la grâce instruit par Jésus-Christ,
    Combattant pour l'Eglise, a, dans l'Eglise même,
    Souffert plus d'un outrage et plus d'un anathème.
    Plein de feu qu'en son coeur souffla l'esprit divin,
    Il terrassa...

  • Qui frappe l'air, bon Dieu ! de ces lugubres cris ?
    Est-ce donc pour veiller qu'on se couche à Paris ?
    Et quel fâcheux démon, durant les nuits entières,
    Rassemble ici les chats de toutes les gouttières ?
    J'ai beau sauter du lit, plein de trouble et d'effroi,
    Je pense qu'avec eux tout l'enfer est chez moi :
    L'un miaule en grondant comme un tigre en furie ;...

  • Craignez-vous pour vos vers la censure publique ?
    Soyez-vous à vous-même un sévère critique.
    L'ignorance toujours est prête à s'admirer.
    Faites-vous des amis prompts à vous censurer ;
    Qu'ils soient de vos écrits les confidents sincères,
    Et de tous vos défauts les zélés adversaires.
    Dépouillez devant eux l'arrogance d'auteur ;
    Mais sachez de l'ami discerner le...