• C'était une belle brune
    Filant au clair de la lune,
    Qui laissa choir son fuseau
    Sur le bord d'une fontaine,
    Mais courant après sa laine
    Plongea la tête dans l'eau,

    Et se noya la pauvrette
    Car à sa voix trop faiblette
    Nul son désastre sentit,
    Puis assez loin ses compagnes
    Parmi les vertes campagnes
    Gardaient leur troupeau...

  • O que nous t'estimons heureuse,
    Gentille Cygale amoureuse,
    Car aussi tost que tu as beu
    Dessus les arbrisseaux un peu
    De la rosée, aussi contente
    Qu'est une princesse puissante,
    Tu fais de ta doucette vois
    Tressaillir les monz et les bois.

    Tout ce qu'aporte la campagne,
    Tout ce qu'aporte la montagne,
    Est de ton propre. Au...

  • Pendant que vostre main docte, gentille et belle
    Va triant dextrement les odorantes fleurs
    Par ces prez esmaillez en cent et cent couleurs,
    Par le sacré labeur de la troupe immortelle :

    Gardez qu'Amour tapy sous la robe nouvelle
    De quelque belle fleur n'evente ses chaleurs,
    Et qu'au lieu de penser amortir vos douleurs,
    D'un petit traict de feu ne...

  • Embrasse-moi, mon coeur, baise-moi, je t'en prie,
    Presse-moi, serre-moi ! À ce coup je me meurs !
    Mais ne me laisse pas en ces douces chaleurs :
    Car c'est à cette fois que je te perds, ma vie.

    Mon ami, je me meurs et mon âme assouvie
    D'amour, de passions, de plaisirs, de douceurs,
    S'enfuit, se perd, s'écoule et va loger ailleurs,
    Car ce baiser larron...

  • Ainsi, ma douce guerrière
    Mon coeur, mon tout, ma lumière,
    Vivons ensemble, vivons
    Et suivons

    Les doux sentiers de la jeunesse :
    Aussi bien une vieillesse
    Nous menace sur le port,
    Qui, toute courbe et tremblante,
    Nous entraîne chancelante
    La maladie et la mort.

  • Si tu veux que je meure entre tes bras, m'amie,
    Trousse l'escarlatin de ton beau pellisson
    Puis me baise et me presse et nous entrelassons
    Comme, autour des ormeaux, le lierre se plie.

    Dégraffe ce colet, m'amour, que je manie
    De ton sein blanchissant le petit mont besson :
    Puis me baise et me presse, et me tiens de façon
    Que le plaisir commun nous...

  • Avril, l'honneur et des bois
    Et des mois,
    Avril, la douce esperance
    Des fruits qui soubs le coton
    Du bouton
    Nourrissent leur jeune enfance ;

    Avril, l'honneur des prez verds,
    Jaune, pers,
    Qui d'une humeur bigarrée
    Emaillent de mille fleurs
    De couleurs
    Leur parure diaprée ;

    Avril, l'honneur des souspirs
    Des zephyrs,...

  • A la France.

    Oyseau qui de garde fidelle
    Dessillé fais la sentinelle
    Sous le silence de la nuit,
    Réveillant d'une voix hardie
    La troupe de somme engourdie
    Et de paresse, à ton haut bruit.

    Oyseau à la creste pourprée
    Compagnon de l'Aube dorée,
    Trompete des feux du Soleil,
    Qui te perches à la mesme heure
    Qu'il plonge en mer sa...

  • Celuy n'est pas heureux qui n'a ce qu'il desire,
    Mais bien-heureux celuy qui ne desire pas
    Ce qu'il n'a point : l'un sert de gracieux appas
    Pour le contentement et l'autre est un martyre.

    Desirer est tourment qui bruslant nous altere
    Et met en passion ; donc ne desirer rien
    Hors de nostre pouvoir, vivre content du sien
    Ores qu'il fust petit, c'est...

  • Espritz qui voletez sur le bruict que bourdonne
    Le fleuve recourbé qui de son viste cours
    Leche presque le tour de ceste ville, ou l'ours
    Qui fut premier trouvé le redouté nom donne :

    Si devot quelque fois vostre troupe mignonne
    J'honore de mes vers, et sur les legers tours
    Que le soir vous tournez, de mes divers discours
    De son trist' enroüé pour...